Le constat d’Emmanuel Macron est réaliste. L’État prend enfin la mesure du problème dénoncé depuis si longtemps par tant de spécialistes. Il s'agit de faire la guerre au séparatisme islamiste, à l'islamisme.
Au-delà du constat, le diagnostic est-il le bon ? Essentiel car il conditionne l'efficacité des solutions...
Enfin, les solutions sont-elles adaptées et ne constitueront-elles pas une nouvelle fois un veux pieux ?
Telle me semble devoir être l'analyse à faire de ce discours tant attendu du Président de la République sur le séparatisme islamiste.
Je serais prêt à souscrire à la rigueur du constat, à l'ambition de certaines des solutions avancées mais j'avoue mon malaise lorsque je lis :
« Ce travail a été fait et a permis d'identifier dans chaque département, ou dans certains territoires de manière interdépartementale, les interlocuteurs, donc de structurer un dialogue. Et nous avons mené un vrai travail, une vraie réflexion avec le Conseil français du culte musulman. Et c'est ce chemin que nous allons ouvrir ensemble. C’est-à-dire, essayer ensemble de bâtir une organisation qui va nous permettre, je l'espère, je le crois, de construire un islam des Lumières dans notre pays. C'est-à-dire un islam qui puisse être en paix avec la République, en respectant toutes les règles de séparation et en permettant d'apaiser toutes les voix. Ce n'est pas le travail de l'État de structurer l'islam. Mais nous devons, nous, permettre, accompagner cette émergence, et c'est ce que ce dialogue, toute cette préparation nous a permis de faire. »
J'ai en effet du mal à comprendre comment notre État laïc qui reconnaît n'avoir pas à structurer l'Islam pourrait s’arroger le droit de construire un Islam des lumières ? Ne sommes-nous pas en pleine contradiction ?
Quant à l'islam des lumières c'est une vieille lune maintes fois ressassée et dont les spécialistes ont mis en évidence qu'elle est une vue de l'esprit[1]. Pour faire court – mais je vous invite à lire ou relire ce discours en entier [2] -je reprendrai l'analyse du Pape Benoît XVI dans son discours de RATISBONNE sur la question de la conversion par la force :
L’affirmation décisive de cette argumentation contre la conversion par la force dit : « Ne pas agir selon la raison est contraire à la nature de Dieu ». L'éditeur du texte, Théodore Khoury, commente à ce sujet: « Pour l'empereur, byzantin nourri de philosophie grecque, cette affirmation est évidente. Pour la doctrine musulmane, au contraire, Dieu est absolument transcendant. Sa volonté n'est liée à aucune de nos catégories, fût-ce celle qui consiste à être raisonnable ».
Difficulté fondamentale posée par nombre des textes sacrés de l’Islam.
Mais il faut aller plus loin pour arriver au cœur du sujet et de la problématique d’un Islam des lumières qu’on ne peut refuser par principe.
Véritable messianisme, l’Islam a vocation à établir le « vrai Islam » pour demain, à soumettre les incroyants à Dieu, s’il le faut par la force. Vérité fondamentale d’une guerre perpétuelle contre l’humanité qui reste au cœur de nombre de versets et de sourates, même si tous les musulmans, les plus modérés, n’y adhèrent pas intégralement. D’où une profonde ambiguïté dès lors que ces versets et sourates ne sont pas officiellement répudiés. D’où une nécessaire prudence politique quand on sait que certains de ces versets prônent la taqiya qui n’est autre que la pratique stratégique du mensonge…
Il faut aussi rappeler une difficulté rappelée par sa SS Benoit XVI à la suite du rappel de la controverse qui en profita pour développer une analyse extrêmement approfondie des rapports entre la foi et la raison qu'il conclut de la manière suivante :
« Depuis longtemps, l'Occident est menacé par cette aversion pour les interrogations fondamentales de la raison et il ne pourrait qu'en subir un grand dommage. Le courage de s'ouvrir à l'ampleur de la raison et non de nier sa grandeur – tel est le programme qu'une théologie se sachant engagée envers la foi biblique doit assumer dans le débat présent. « Ne pas agir selon la raison, ne pas agir avec le Logos, est en contradiction avec la nature de Dieu » a dit Manuel II à son interlocuteur persan, en se fondant sur sa vision chrétienne de Dieu. »
A ce stade selon moi le risque d’échec de notre État sous l’impulsion du Président de la République face au mal qu'il dénonce avec autant d'acuité résulte du défaut de prise en considération :
· De la violence de nombre de textes musulmans à l’égard des « roumis » et plus généralement des infidèles.
· De l’ambiguïté liée à notre pratique de la laïcité face à cette caractéristique propre de l’Islam.
· Et de notre incapacité de donner à la raison la place qui lui revient dans le domaine spirituel et culturel.
Car nous nous sommes volontairement affaiblis et fragilisés.
Nous partons du principe que la religion n'est plus qu'un sentiment, qu'elle n'est pas l'adhésion pleine et entière d’un être raisonnable à une vérité qui le dépasse. Ce faisant, nous tombons inévitablement dans le piège tendu par l'Islam qui lui-même conteste ce lien entre la foi et la raison considérant à l'inverse de nous occidentaux que Allah – dont la transcendance exclue toute immanence- s'impose à l'homme sans que ce dernier ne puisse manifester son libre arbitre et son adhésion rationnelle, ce qui explique les violences dont s’accompagne la volonté de conversion musulmane (charia …). Nous sommes sur son terrain. Celui qu’il a choisi depuis l’origine : le rejet de la religion chrétienne, celle « du logos », ce logos qui est une raison créatrice et capable de se communiquer, justement comme raison, en tant que telle.
Les occidentaux se sont privés de la possibilité d'opposer à l'Islam un système qui lui soit contraire et qui précisément ne permette pas les dérives islamistes. N'oublions quand même pas que si d'un côté le christianisme s’est diffusé par un message d'amour, de sacrifices, de véritables oblations personnelles, quelle que soit par ailleurs certaines dérives historiques (l’hommerie sera toujours à l’œuvre tant que le monde sera monde), l'Islam pour sa part repose sur un principe de conversion violent dont les guerres de Mahomet et de conquête des musulmans sont l'illustration la plus flagrante ; guerres qui n’ont rien de comparable quant à leur objet avec nos croisades qui avaient pour but exclusif de redonner accès aux lieux saints.
À partir du moment où nous avons sacralisé le postulat individualiste d'une spiritualité purement subjective et où nous avons exclu de notre univers intellectuel et culturel toute intervention possible et effective de la raison, nous nous sommes désarmés face à des spiritualités tournant le dos aux résidus des valeurs de la civilisation chrétienne que nous avons conservées et sur auxquelles nous nous cramponnons désespérément.
De même, lorsque le Président de la République dénonce les atteintes à l'égalité entre l'homme et la femme, les actes de violence, l'endoctrinement, la pratique du certificat de virginité, il remet en cause des fondamentaux qui sont au cœur même de l'Islam historique même si certains parviennent à le vivre de manière plus « light » ... Et ce n'est pas parce que confrontés au libéralisme occidental et à sa capacité de séduire l'être humain par la satisfaction de tous ses besoins matériels et de jouissance certains musulmans de plus en plus nombreux adoptent un mode de vie non soumis aux préceptes radicaux de l’Islam, que fondamentalement cette religion ne contient pas encore en germe les dérives dénoncées. Ceci est inscrit dans les fondamentaux de cette religion. Et le restera tant que l’ambiguïté évoquée plus haut n’aura pas disparu, tant que nous ne demanderons pas qu’elle soit levée et que nous n’exigerons pas la renonciation explicite à la taqyia.
Toute la difficulté est que si nous en sommes réduits après tant d’années de non-dit à condamner les dérives islamistes, en même temps nous ne nous reconnaissons pas le droit de condamner le sentiment religieux musulman et d’exiger des clarifications religieuses qui seraient pour le coup la voie véritable d’un Islam des lumières, pour reprendre l’expression choisie par Emmanuel Macron.
La contradiction du Président de la République qui veut en même temps proclamer que l’État n'a pas à structurer cette religion mais qu’il souhaite la transformer en un Islam des lumières n’est donc pas insoluble ! Il suffit d’exiger cette clarification.
Encore un effort Monsieur le Président !
Exigez la renonciation explicite à tous les versets et sourates incompatibles avec notre civilisation. Attention, ce n’est pas suffisant, il faut aussi exiger le rejet de la taqyia….
Pour cela il faut lucidité, clairvoyance et courage politique. La tâche est ardue car cette véritable transformation en un Islam des lumières revient à le faire se renier lui-même. Ce qui n’est pas exclu, sous la pression des vraies valeurs de l’occident et compte tenu de la crise qui divise le monde musulman et qui n’ira pas en s’arrêtant au fur et à mesure que sera publiée et démontrée l’imposture sur laquelle repose l’Islam[3].
Mais cette attitude est contraire à notre conception de la neutralité laïciste, véritable cheval de Troie dans lequel l’Islam s’est installé depuis bien longtemps. Sauf qu’une saine laïcité est en droit d’exiger la renonciation à la communion à des textes qui constituent une atteint à la sécurité publique !
Voilà elle revient aussi à admettre que la raison puisse jouer un rôle que l'Islam ne lui a jamais reconnu et que la république ne lui reconnaît pas plus sous prétexte de son sacro-saint libéralisme et parce qu’elle repose philosophiquement sur cette erreur fondamentale. Pour atteindre cet objectif il faudra imposer un véritable effort au monde musulman mais plus encore à tous nos cadres politiques, médiatiques, sociaux, religieux-et oui !- et culturels.
C’est donc un deuxième pas de géant qui attend nos politiques : après avoir enfin reconnu la réalité et la gravité de la situation, il leur faut convaincre les acteurs de s’engager dans cette voie de la clarification, et plus encore nos grands esprits républicains -ceux qui distribuent actuellement les points de bonne conduite- que la tâche sera la plus compliquée…
A défaut il est évident que cette politique posera des problèmes avec les autres religions qui ne comprendront pas qu’on leur impose des restrictions insupportables et qu’on les mette sous contrôle alors que leur prosélytisme ne justifie pas les mêmes critiques !
Nous vivons la fin d’un système philosophique qui nous aveugle et nous neutralise. Je pense ce que je veux. Je crois ce que je veux. J’aime ce que je veux. C’est moi qui décide ! Je ne reconnais à personne le droit de raisonner pour moi et de démêler le vrai du faux. Je ne peux pas me tromper… Je suis mon propre sauveur ! Ce qui rappelle le gnosticisme de ces faux postulats qui historiquement ont été le lit de bien des dérapages. Et l’État devrait être le gardien de cette fausse liberté qui nous rend esclaves de nos erreurs et de nos sentiments pas toujours ajustés…
Dès lors avons-nous le droit de laisser aux musulmans sincères et pacifiques – et il y en a - la possibilité de pratiquer une religion que nous refusons d’exiger qu’elle soit élaguée des textes leur permettant de créer cet insupportable séparatisme qui ne sera que la future rampe de lancement de la confrontation entre le « Dar-el-islam » (demeure de la paix et de la justice) et le « Dar-el-arb » (demeure de l’injustice et de la mécréance).
20 siècles de Christianisme que nous nous sommes évertués à démolir et à discréditer pour nous « affranchir » nous ont pourtant montré la voie ajustée d’une raison respectueuse de la liberté, particulièrement celle de conscience, qui peut seule instaurer un dialogue fructueux et porteur d’avenir entre les religions sous le regard avisé d’un État respectueux de chacun et soucieux du respect de la vérité. De cette vérité patiemment recherchée avec humilité et vigilance !
CQFD….
Cette affaire du séparatisme islamiste finira par faire exploser nos conceptions erronées. Peut-être réaliserons-nous ainsi que la religion des lumières est celle de la lumière de la crèche, de la Résurrection, de la Pentecôte et d’un au-delà que nous avons renoncé à chercher et à espérer, car comme les moines de Thibirine et le bienheureux Charles de Foucault en sont la démonstration la lumière ne vient pas de Mahomet.
A moins que l’État comprenne, prenne conscience du danger, et se lance dans l’épreuve salvatrice de la grande clarification !
Allez encore un effort Monsieur le Président !
Cher Bernard,
RépondreSupprimerL'Islam des Lumières est un vœu pieux...
En effet l'Islam étant autant une religion qu'un système politique à vocation universelle, je vois mal que le CFCM, seul interlocuteur "raisonnable" du gouvernement, ne représente guère plus qu'un quart des mosquées françaises.
On peut dès lors se demander comment serait accepté ce véritable schisme par le reste de la communauté musulmane.
Cela étant dit, si le diagnostic est juste, la loi en préparation semble se diriger dans la bonne direction, mais c'est faire peu de cas de son passage initial devant le Conseil d'Etat, puis devant le Conseil constitutionnel en aval de la Chambre... et on sait bien quelle est aujourd'hui la réalité du gouvernement des juges.
Conclusion : l'intention est bonne, mais je demande à voir !
Bien à toi.
CR