Emmanuel Macron a voulu célébrer Jean de LA FONTAINE et s’est choisi un interlocuteur de talent en la personne de Fabrice Lucchini.
Jusque-là rien à dire ; au contraire.
Sauf que, l’espace d’un jour, Fabrice Lucchini devint le fou de Jupiter… et emporta tout dans sa lancée.
Non célébrer LA FONTAINE n'est pas chose aisée!
C’était à Château-Thierry[1].
Les deux compères réunis, tutoiement de rigueur…, nous
ont doté d’un numéro qui n’était ni à la mesure de l’événement, ni à celle de
leurs qualités, ni encore à celle du talent de l’artiste. Lucchini n’était pas
à l’aise malgré les apparences, pas naturel même s’il se força pour nous
persuader du contraire, et incapable de nous persuader de l’évidente actualité
de notre illustre fabuliste dont on célèbre en 2021 le 400ème anniversaire de
la naissance. Emmanuel Macron n’était pas présidentiel ; mais nous en
avons l’habitude.
La célébration d'un poète de cette envergure ne peut être confiée au meilleur des artistes; chacun son rôle quel que soit son talent.
Tel que diffusé le dialogue s’est concentré sur un LA FONTAINE admirable technicien de la langue française et de la poésie. Il n’est pas
question pour moi de lui contester ces qualités, bien au contraire. Mais cette
réduction du legs de La Fontaine à un savoir-faire me laisse un goût amer. Il n’y
a pas que cela dans les fables ! La technique envahit tout, même la
culture. On détruit nos œuvres majeures en les décortiquant de manière formelle
au risque d’en oublier la substance, les messages.
Rafraichissons-nous la mémoire en relisant l’adresse au Dauphin à qui ces fables furent dédiées par l’auteur :
Je chante les héros dont
Esope est le père,
Troupe de qui
l'histoire, encor que mensongère,
Contient des vérités
qui servent de leçons.
Tout parle en mon
ouvrage, et même les poissons :
Ce qu'ils disent
s'adresse à tous tant que nous sommes ;
Je me sers d'animaux
pour instruire les hommes.
Illustre rejeton d'un
prince aimé des cieux,
Sur qui le monde
entier a maintenant les yeux,
Et qui faisant
fléchir les plus superbes têtes,
Comptera désormais
ses jours par ses conquêtes,
Quelque autre te dira
d'une plus forte voix
Les faits de tes
aïeux et les vertus des rois.
Je vais t'entretenir
de moindres aventures,
Te tracer en ces vers
de légères peintures ;
Et si de t'agréer je
n'emporte le prix,
J'aurai du moins
l'honneur de l'avoir entrepris.
Emmanuel Macron, jeune président, n’a-t-il pas grand profit à tirer de ces fables ? Comme nous autres d’ailleurs…
Toutefois la réduction technicienne, formelle, dissout le message.
Elle nous le fait perdre de vue. Elle nous empêche de le connaître et d’en
tirer des leçons.
C’est le grand problème de notre relation à la culture. Dissoudre le message. Le désubstantialiser. Nous placer à l’extérieur, en simple spectateur. Prendre de la distance.
C'est ainsi que nous finissons par tout accepter, tout admettre, tout tolérer puisque seule
la forme est en cause. L’appréciation technique emporte tout.
Voilà comment on peut dire qu’il n’y a pas de culture française…; suivez mon regard …
Les fables nous parlent, nous enseignent. Elles ne se
contentent pas de nous émerveiller par la qualité de leur écriture, même si
celle-ci est immense…
J’envisageais de vous proposer de passer notre été avec
Balzac. Je me demande à la réflexion si nous n’allons pas le passer avec Jean de La Fontaine…
[1] https://www.lci.fr/culture/emmanuel-macron-a-chateau-thierry-chez-la-fontaine-ces-fables-que-les-politiques-adorent-2189018.html
Et si on le passait en famille ? C’est porteur de sens aussi non ?
RépondreSupprimer