J’ai écouté avec grand intérêt et beaucoup de curiosité l’émission REPLIQUE
d’Alain Finkielkraut qui recevait Rémi Brague et Denis Moreau, deux philosophes
catholiques, sur le thème « Etre catholique aujourd’hui ». Mal m’en a
pris !
Denis Moreau
étala son embarras et le couronna en soutenant la possibilité philosophique « d’affaiblir
la toute-puissance de Dieu » (sic !)…. Et Rémi Brague de dire qu’il
n’avait rien à ajouter ! Pour clore le tout, l’un et l’autre sont restés
muets face à leur hôte lorsqu’il enchaîna sur la soi-disant obscénité de la providence et l’
« improvidence » de Dieu proclamée par Primo Levi après Auschwitz ….
Si difficile que soit la question, comment
l’éluder ainsi ?
Il s’agit de notre problème principal, que
nous soyons croyant ou incroyant. Nombreux sont ceux qui ont buté, buttent et
butteront sur le problème du mal ! Mystère insondable ; mystère de l’iniquité
proclamé par Saint Paul….; mais si le philosophe n’a pas de réponse, car il
n’en a pas, le croyant en connait une, proclamée par NSJC et son Eglise, même
si elle n’élimine pas toutes les questions et les doutes. Celui qui a la chance de confesser la
Foi catholique ne peut pas fuir ce mystère et refuser de proclamer la
réponse que Dieu lui a apportée!Si complexe et délicat soit-elle....
Il est vrai que résulte du
péché originel, du Diable et de notre fascination pour le mal. Toutes
les horreurs de ce siècle rouge de sang plongent leurs racines dans le péché
des hommes. Il est vrai que dans ses propos préalables Denis Moreau avait déjà
pris quelques distances avec le péché, concept devenu selon lui inconcevable
pour l’homme moderne… Mais c’est pourtant l’unique explication. Quant au diable, il ne faut même pas en laisser supposer l'existence....Nous sommes
seuls responsables des crimes que nous commettons ou laissons commettre sous
l’influence de Satan qui promit à Adam et Eve d’être comme des dieux ! Car
nous demeurons tiraillés entre notre Foi et notre désir de nous croire maître
de l’univers. Péché originel à propos duquel Pascal renvoie encore au mystère:
« L’homme est plus inconcevable sans ce mystère que ce mystère n’est
inconcevable à l’homme ».
Quant au fait que Dieu laisse faire, c’est
parce qu’il nous a créés libres. Nous ne sommes pas des marionnettes entre ses
mains ; auquel cas notre vie serait un enfer, et Dieu ne serait pas Dieu
parce qu’il ne serait pas bon…
Voilà qui conduit à la réponse à la si
douloureuse question d’Alain Finkielkraut quant à la soi-disant obscénité d’une
providence divine qui laisserait faire. Nous ne pouvons rien demander à Dieu, ni a
fortiori à exiger de lui, dans ce champ terrestre qu’Il nous a confié et dont
nous sommes les seuls laboureurs. Il en souffre lui-même, et au plus haut point,
dans la mort de son fils sur la croix que son Eglise perpétue et
renouvelle pour notre salut; et la liberté dont il nous a dotés ne lui permet
pas de se substituer à nous. La divine providence désigne, selon le Catéchisme
de l’Église catholique (CEC), « les dispositions par lesquelles Dieu conduit
avec sagesse et amour toutes les créatures jusqu’à leur fin ultime » (CEC,
302), c’est-à-dire, pour les hommes, leur union à Dieu. Autre mystère
insondable dont les saints et leurs miracles témoignent de la réalité et de l’authenticité…
Elle n’est obscène qu’à cause de notre aveuglement, de notre enfermement et de
notre isolement.Elle ne devient obscène à nos yeux que parce que nous ne supportons pas l'idée que l'homme, c'est à dire nous, puissions commettre de pareils horreurs. L'homme est tellement capable de déchoir, qu'il voudrait que Dieu puisse l'en empêcher! Mais notre liberté est à ce prix....
La réponse à la question du mal se trouve donc
dans un insondable mystère. Comment peut-il en être autrement puisqu’elle nous
renvoie à celui de notre existence, de la création et de Dieu. Mais la force du
Catholicisme est dans la proclamation de ce mystère divin. L’Eglise est un
viatique. Elle est mystère en même temps qu’elle est Jésus répandu et
communiqué. Elle nous nourrit du Ciel par la grâce de ses sacrements. Elle est
la réponse. Même si il est parfois difficile d’y adhérer, tant le mal nous
touche au plus profond de nous-mêmes.
Telles sont les raisons de mon étonnement en constatant
que nos deux philosophes n’osèrent pas se prononcer! Non pas que je prétende
avoir moi-même tout résolu, tant le mystère est grand; et je suis conscient de
la difficulté de cette réponse dans un monde pour lequel le croyant devient un
extra-terrestre. Il est si difficile de concilier réalité et mystère…. Mais c’est
la seule réponse. Répondre au mystère par un autre mystère avec l’aide de la Grâce que l’Eglise nous donne en abondance.
Nous sommes tous des disciples d’Emmaüs qui
ne reconnaissaient pas Jésus marchant avec eux. Il était pourtant là, à leurs
côtés…. Lui qui venait justement de tuer le péché et la mort en
ressuscitant ! Mystère de sa présence surnaturelle et réelle….Mystère de
l’Eglise fondée sur la résurrection ! mystère de l'Eglise corps de ce Christ répandu et communiqué à tous les hommes de bonne volonté;
La seule réponse au mal est dans
l’agenouillement de l’homme tentant de pénètrer le silence de l’éternité, abandonnant
tous ses oripeaux et détournant son regard du tentateur…. Elle est spirituelle,
elle n’est pas philosophique. Elle passe par l’humilité et l’acceptation de
notre finitude. Elle n’est inaccessible à personne, sauf que dans notre monde
qui explique tout et qui veut tout comprendre elle est sans doute plus
difficile à admettre et à mettre en œuvre que jamais…. Comme si nos lumières
étaient l’antichambre des ténèbres…
Semper idem !...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Commentez cet article et choisissez "Nom/URL" ou Anonyme selon que vous souhaitez signer ou non votre commentaire.
Si vous choisissez de signer votre commentaire, choisissez Nom/URL. Seul le nom est un champ obligatoire.