J’ai à nouveau présenté mon livre « L’Avocat face à
l’IA » ; cette fois-ci à Paris lors d’un petit déjeuner prestigieux et
passionnant avec le Cercle des Stratèges disparus[1]. Tout un programme ! Je
faisais le point dans le train du retour, repensant à ASIMOV et à ses lois…
Je m’interrogeais donc, mais plus qu’à l’accoutumée… Sans doute
parce que les questions des "Stratèges" qui n'ont au demeurant rien de disparus..., avaient été pertinentes, faisant ressortir avec une
encore plus grande acuité l’importance de nos réticences face au mythe, à la
force du mythe de l’IA et de la singularité technologique. Le débat fut l’occasion
de répondre à beaucoup de questions posées par les progrès de l’IA et l’évolution
de mon métier. L’un des participants évoqua même les travaux en cours en vue de
la « construction de cerveaux artificiels » à partir de cellules
humaines… Ce déplacement parisien avait en même temps été l’occasion de faire
le tour de mes librairies préférées et en particulier d’y acheter les dernières
nouveautés sur ce sujet que je parcourais en diagonale en même temps que les
beaux paysages de notre France défilaient sous mes yeux. Ce sont au fond
toujours les mêmes problématiques qui reviennent…Tout le monde s’interroge, du
lanceur d’alerte au drogué des datas et des algorithmes.
J’en vins ainsi à me poser la question que j’ai en partie éludée
dans mon livre, bien qu’elle ne me fût pas passée inaperçue. Et si tout cela n’était
que le ronronnement de notre marche suicidaire vers une catastrophe ontologique
absolue ? Ne faut-il pas refuser
de manière catégorique les progrès de l’IA ?
On me fait souvent le
reproche de ne pas être « pour » l’IA. Ce à quoi je réponds que j’appelle
à la prudence, à la vigilance et à la nécessaire maîtrise des outils d’IA. Cependant
je pourrais être réellement contre l’IA à l’image des animateurs de l’association
contre l’IA[2],
qui font écho par exemple à Eric Sadin que j’ai beaucoup lu et cité, lequel n’hésite
pas à écrire à la suite de la parution de son dernier livre[3] « la
complémentarité homme machine est une fable ».
J’étais pourtant sorti réconforté de la lecture du livre
passionnant de Kaspard KOENIG [5], bien que le titre "la fin de l'individu" en fut
inquiétant. Tout en mettant en exergue les risques engendrés par l’IA, il y propose
des pistes pour la maîtriser. Comme par exemple, imposer nos choix moraux aux
constructeurs d’algorithmes, revendiquer la propriété de nos données
personnelles etc….
Toutefois la question fondamentale revenait, lancinante et inquiétante; et si nos polytechniciens fondateurs de l’AFCIA avaient raison.
Et si le diable se cachait derrière le robot ?
Écoutons l’un d’eux :
« On peut
très bien être animé des meilleures intentions, mais il n’empêche que la
technique vous mène par le bout du nez. La critique du progrès technique
est un courant minoritaire dans l’opinion parce qu’on ne sait pas très bien par
quel bout prendre la chose. Avec l’IA, on sait très bien ce qu’on fait : on
remplace le cerveau humain. En interdisant ce « progrès » frénétique,
vous rendez la possibilité au progrès technique d’évoluer à une vitesse que les
hommes sont capables d’assimiler afin d’adapter leurs conditions sociales et
économiques pour éviter des conséquences désastreuses. Quelles seraient ces
conséquences ? Pour y répondre, il faut se demander quel est le seul
facteur qui soit de nature à accélérer d’une manière hors de proportion les
possibilités de contrôle politique et sociale de l’humain : c’est l’IA.
Toutes les autres techniques (biologiques, chimiques, nucléaires) sont
contrôlables, par définition. L’intelligence artificielle, la vraie, ne l’est
pas. On veut marcher le plus vite possible vers quelque chose, mais sans savoir
où l’on va. » [6]
Me revenait à l'esprit l'alerte du stratège de ce matin: remplacer le
cerveau humain par un cerveau artificiel créé à partir de nos propres cellules ?!?!?!....
Faudra-t-il
fixer une barrière éthique au développement de l’IA ? Est-ce souhaitable
en même temps qu’envisageable ? On peut toujours rêver répondra sans doute
Gaspard KOENIG dont le livre montre que les chinois ne s’arrêteront
pas à de pareilles considérations ; même les notions que nous voulons
protéger avec notre RPGD ne justifient pas pour eux qu’on arrête la course en
avant conduite par les promoteurs apatrides de l'IA….
Et pourtant nous devrons fixer des limites en forme d’interdits moraux et
éthiques. Car on ne peut pas placer l’humain sous la domination d’une machine
quelle qu’elle soit, ou prendre le risque qu’elle puisse l’être.
Telle est LA
QUESTION, FAUT-IL INTERDIRE L'INTELLIGENCE ARTIFICIELLE? ....
Elle est valable pour les avocats et pour un chacun, à la condition que nous regardions plus loin que l'horizon de nos écrans et de leurs performances… y compris pour les chinois à la condition qu’ils s’affranchissent de la tutelle morale du communisme, de l'utilitarisme et de l'efficacité économique ….
Elle est valable pour les avocats et pour un chacun, à la condition que nous regardions plus loin que l'horizon de nos écrans et de leurs performances… y compris pour les chinois à la condition qu’ils s’affranchissent de la tutelle morale du communisme, de l'utilitarisme et de l'efficacité économique ….
A suivre…
[1]
http://www.cercledesstrategesdisparus.com/
[2]
http://afcia-association.fr/lhumanisme-selon-lafcia/
[3]
https://www.amazon.fr/Lintelligence-artificielle-lenjeu-si%C3%A8cle-antihumanisme/dp/2373090503/ref=sr_1_1?__mk_fr_FR=%C3%85M%C3%85%C5%BD%C3%95%C3%91&keywords=eric+sadin&qid=1570993804&s=books&sr=1-1
[4]
https://usbeketrica.com/article/on-peut-etre-contre-l-intelligence-artificielle-par-principe
[5] La fin de l'individu : Voyage d'un philosophe au pays de l'intelligence artificielle chez DE FACTO
[6]
https://usbeketrica.com/article/on-peut-etre-contre-l-intelligence-artificielle-par-principe
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