Je reprends le cours normal de mes billets hebdomadaires. Chronique du temps qui passe. Chronique des affres du quotidien. Chronique des incidents, des provocations, des crises qui sont malheureusement monnaie courante. Chronique d’un temporel qui va mal.
Mais Jacques BAINVILLE, le grand historien, nous a rappelé
que tout a toujours été très mal
Chronique plutôt donc de ce qui se cache derrière nos
inquiétudes, nos turpitudes, derrière tout ce qui fait sens au-delà de la
sinusoïde des événements.
Le fait est toutefois que nos angoisses se nourrissent des
événements qui s'accélèrent sur les plans international et économique ; mais
aussi des délires de l'idéologie Woke, de l'irresponsabilité de nos
responsables politiques, de la spirale de l'échec de notre système éducatif, de
l'absence de solutions politiques concrètes au problème posé par l'immigration
? Et demain l’euthanasie ou la GPA … Cela semble être un tsunami
Ce caractère anxiogène de « la crise » est
accentué par un débat généralisé et permanent, comme si nous étions
responsables de tout ce qui va si mal. La démocratie est devenue le cadre
institutionnel du débat… On nous fait arbitres de tout en même temps qu’on
nous gave d’avis et d’expertises. N'êtes-vous pas submergés par une immense perplexité
face aux analyses dont on nous assomme
pour tout, sur tout, en tout ?
Pour l’heure, il m'apparaît donc plus important d’essayer de
relativiser afin d’être positifs. Prendre de la distance. Mettre tout ce qui
nous agite en perspective. Mais quelle perspective ? Tout simplement celle de
notre survie, de notre bonheur, celui dont nous sommes les artisans et les
seuls acteurs et dont nous nous sommes laissés déposséder, comme par substitution
!
Après avoir fréquenté Gilbert K. CHESTERTON pendant l'été je
m'aperçois de la vanité de beaucoup de ces discours, échanges, discussions,
billets. Il fut l'apôtre de l'émerveillement. Or nous ne savons plus nous
émerveiller. II fut le chantre du paradoxe ; un paradoxe qu’il n’imaginait
pas, qu’il ne conceptualisait même pas, mais qu’il identifiait dans la vie,
dans les événements, dans la pâte humaine et sociale. Or nous ne savons plus « voir
ce que nous voyons » nous dit Péguy toujours lui, lorsqu’il s’agit d’aller à
l’essentiel… Comment s’étonner dès lors de notre inaptitude à identifier les
paradoxes pourtant éclatants et révélateurs de notre mode de vie individuelle et sociale ? Je cherche un
Gilbert K. CHESTERTON dans tous les experts pontifiants des chaines d’information
continue. En vain… Je ne trouve que des charlatans qui ne sont que les agents
inconscients de ce grand renversement moral et politique.
L'essentiel est donc de trouver les moyens de s’abstraire de
cette ambiance anxiogène même si nous n'avons pas le droit de nous
désintéresser de notre avenir collectif.
Car il va de soi que nous sommes personnellement impuissants
à arrêter la guerre entre la Russie et l'Ukraine, à résoudre la catastrophe
énergétique dans laquelle les pouvoirs successifs nous ont plongés ou encore
l'inflation provoquée par l'insouciance et l'imprévoyance des efforts économiques
engagés pour combattre les effets de la pandémie du COVID-19.
Oui tout va très mal
Que nous reste-t-il ? Rien ? Le désespoir ? L'abandon ?
Certainement pas ...Peut-être l’essentiel
Face au constat de notre impuissance immédiate, personnelle
à renverser ces réalités négatives, alarmantes et inquiétantes une question
lancinante revient : Que faire ? A quoi se raccrocher ? Quels
combats mener ?
À l'occasion des célébrations qui ont entouré le décès de la
reine Élisabeth II et ses obsèques mon attention a été attirée par une remarque
saisie au hasard de l’une de mes nombreuses lectures. Certes nos amis anglais
nous ont-ils apporté la démonstration de la force de la tradition, de la
continuité, de la sagesse dont leur reine avait fait preuve et que leur
monarchie semblait leur réserver. Unité, continuité, sens de la Nation, du « nous
commun ». Cependant force est de constater que leurs problèmes politiques,
économiques et sociaux sont particulièrement aigus. Tout va très mal outre-manche
malgré la royauté... La monarchie a-t - elle changé quelque chose ? Objectivement
rien de ce qui va mal... Mais l'unité, la continuité, le sens de la Nation, au
fond tout ce qui fait cette fierté anglaise, sont un patrimoine immatériel préservé
par leurs institutions monarchiques, non pas parce qu'elles sont monarchiques
mais parce qu'elles traversent le temps et assurent une stabilité
institutionnelle. Cela permet aux anglais d'assumer et de transcender les peines
du quotidien. Ils en tirent un soutien, une force pour faire face à la tempête.
J'insiste, car nous touchons un point déterminant que nous
avons trop tendance à oublier. Lorsque je répète que tout va mal et que tout a
toujours été très mal, il y a bien sûr des moments plus ou moins heureux. Nos
pérégrinations terrestres ne sont pas faites que de bonheur et de réussite. Loin
de là. Et il ne peut pas en être autrement. Il n’y a pas de paradis sur terre.
L’histoire le démontre. Toute la question est de savoir comment on transcende ces
conjonctures négatives pour survivre et mieux même, malgré cela, atteindre le
bonheur. Et Dieu sait que nous sommes privilégiés tant par rapport à nos ancêtres
que par rapport aux ukrainiens, aux iraniens ou aux africains soumis à la
famine et aux atrocités des islamistes, pour ne citer qu’eux
La grande erreur de notre époque est résumée dans le slogan de
François Mitterrand nous faisant croire que la politique pouvait nous procurer
le bonheur. Les institutions de la République, comme celle de la monarchie en
Angleterre, ont pour objet de permettre aux politiques de gérer les événements
de telle sorte que les citoyens puissent trouver le soutien et le souffle leur
permettant de continuer leur chemin. Les recettes, les cuisines auxquelles
l'époque moderne nous a habitués depuis quelques décennies ne sont que de la
démagogie politicienne électoraliste. À cet égard la modestie, l'empathie, la
bienveillance de la reine Élisabeth II à l'égard de ses sujets, qui fait penser
à celle passée de nos rois de France, apporte la distance vis à vis du
quotidien. Elle montre que le pouvoir politique, institutionnel, est d'abord là
pour faire lien, aider, assister, soutenir et non pas pour transformer,
édifier, bonifier ou réaliser je ne sais quelle billevesée contemporaine ou
utopie suicidaire
À cette première erreur s'en ajoute une seconde également
très partagée selon laquelle il y aurait un système d'institution de référence,
miraculeux susceptible de faire en sorte que tout n’aille pas mal. Le régime
idéal. Erreur souvent nourrie de beaucoup de nostalgie et d'illusion.
Alors, que faire ?
Tout d'abord, nous débarrasser de nos illusions, de nos
rêves, de notre refus d'accepter que nos existences ne soient pas toujours
confrontées d'une manière ou d'une autre à une forme de mal ou d'échec. Être
pragmatique. Accepter sans subir. Sans illusion. Sans prétention. Mais aussi
sans concessions.
Il nous revient ensuite de manière impérative, vitale,
salutaire de créer autour de nous des espaces de respiration individuelle et
collective, des pôles de résistance. En dehors de nos « votations »
qui ne sont plus l'expression d'une démocratie véritable, nous n'avons pas de
moyens d'action concrets et efficaces à notre disposition pour modifier le
cours actuel des événements. Cela est même vrai sur le plan culturel,
intellectuel, philosophique, religieux tant il est vrai qu'un processus délétère
est en cours que rien ne semble devoir ni pouvoir arrêter. Mais, encore une
fois, il n'y a là rien de nouveau. Prenons l'exemple de l'Eglise, institution
pourtant divine et inspirée. Elle a procuré et procurera toujours la grâce sanctifiante, mais Elle n'a jamais été affranchie des difficultés et
particulièrement de l'hommerie
Alors que faire ?
Combien de fois ai-je déjà cité le discours d’Alexandre SOLJENITSYNE
à Harvard en 1978 dans lequel celui-ci nous appelle au courage et au refus du
mensonge ? Savoir dire non. Savoir être en vérité. J’y reviens donc, au
risque d’être redondant.
Alors que tout fout le camp, que nul ne sait où nous allons -
qui nous aurait dit il y a trois ans que nous connaîtrions une pareille
bousculade de catastrophes en tous genres, sanitaire, économique, diplomatique -
seuls des hommes et les femmes arc-boutés sur la vérité de la vie en société,
ce qui implique nécessairement le refus du mensonge et le courage, peuvent nous
aider à préparer non pas des lendemains qui chantent mais un avenir qui puisse malgré
les difficultés inhérentes à la vie, être le lit du bonheur pour chacun. Car PEGUY,
encore lui, nous rappelle que « le spirituel couche dans le lit de camp du
temporel ». Ce temporel est notre lot. Nous devons faire avec ! Nous
n’avons pas le droit de le fuir et de déserter.
Alors que nous sommes confrontés au délire d’un processus
qui veut nous emporter mettons en place nos grilles de lecture et d’analyses personnelles.
Récusons. Refusons. Rejetons. Mettons en place autour de nous des barrières
destinées à préserver nos individualités, nos familles, nos enfants, nos
activités de la contagion de tous ces démagogues et ces idéologues, qui n’ont
ni les capacités intellectuelles d'un géant comme Alexandre SOLJENITSYNE, ni la
modestie et la bienveillance d'une reine ÉLISABETH II ou d’un SAINT LOUIS, doivent
être méprisés, ignorés, ridiculisés. Nous leur donnons trop d’importance ne
serait-ce que par notre écoute.
Pour conclure, je voudrais faire référence un débat qui
devrait prendre de l'ampleur et qui illustre parfaitement ce que je veux exprimer.
Il s'agit de la prochaine coupe du monde de football organisée au Qatar. Notre
ancien Président de la République François HOLLANDE a déclaré que s'il était
encore au pouvoir il ne s'y rendrait pas. Il n'a pas osé dire qu'il ne
regarderait pas les matchs à la télévision ce qu’a fait un ancien très grand
footballeur Éric CANTONA. Qui sera capable de ne pas regarder les matchs de
cette coupe du monde que la morale réprouve ? Sommes-nous assez forts pour constituer
ce premier rempart du refus de cautionner ce qui ne doit pas l’être ? La
réponse est évidente même s'il n'est pas certain qu'elle sera concrétisée dans
nos actes tant la tentation sera grande pour les amateurs de ce beau sport… À
n'en pas douter il pourrait en être de même à bien des égards et pour d'autres
sujets. Cela témoignerait de notre refus de rester solidaire d’un système injustifiable.
Cela aurait la puissance du refus et de la détermination de personnes libres !
Il est vrai que nous serions mieux armés pour le faire si à
la tête de nos institutions se trouvait un homme ou une femme affranchi de tout
ce qui va mal et dont le destin serait indéfectiblement lié au notre… Mais il
faut faire avec ce qu’on a ! Tel est notre devoir d’état.
Semper idem !
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