Il y a quelques mois j’avais consacré un billet au dernier livre de Julia de Funès sur l’identité. La question de l’identité est centrale. Alors que le communautarisme monte elle nous passionne et nous divise. Nous avions vu alors que la confusion continuait d’envahir les esprits. Comme si par nature l’identité devait soit réunir soit exclure.
J’avoue avoir été éclairé par la récente interview d’Alain
de Benoist donnée à L’INCORRECT à l’occasion de l’édition de son dernier livre
dont l’identité est aussi l’objet. Il nous propose une mise en perspective
particulièrement intéressante.https://www.valeursactuelles.com/clubvaleurs/lincorrect/entretien-alain-de-benoist-les-enjeux-de-la-question-identitaire
Il est utile de noter la concomitance historique du surgissement
de la question identitaire avec le modernisme et son éclosion au XVIIIe siècle.
La question identitaire ne se posait pas auparavant. Elle a envahi nos
préoccupations au fur et à mesure de nos évolutions et de nos remises en cause
de tout ce qui nous enracine et nous donne des repères. Il y a un vrai jeu de
vase communiquant entre les préoccupations identitaire et moderniste.
Alain de Benoist s’exprime ainsi : « c’est la
disparition généralisée des repères à un moment où toutes les institutions sont
en crise qui finit par faire exploser l’éternelle question identitaire : qui
suis-je ? Qui sommes-nous ? On comprend par-là que cette question ne se pose
vraiment que lorsque l’identité devient incertaine, qu’elle est menacée ou qu’elle
a carrément disparu ».
Ainsi posée la question de l’identité rejoint celle de l’enracinement
qui avait été si admirablement analysée par Simone Weil.
A l’inverse la déconstruction chère à nos agitateurs wokistes
a pour conséquence directe la disparition de l’identité. Il y a là un vrai lien
de causalité.
L’identité n’est pas une construction idéologique. Elle
ne peut se comprendre qu’à partir du réel, des données de l’humanité et de la
vie en société. Voilà pourquoi elle est combattue par les dynamiteurs sociaux. L’identité
résiste à l’idéalisme, aux idées fausses, aux constructions idéologiques. C’est
en cela qu’elle protège l’humain dans l’homme et qu’elle est un obstacle pour tous
ceux qui ne rêvent que de révolution.
L’identité est-elle ce qui nous oppose alors que l’universalisme
serait ce qui nous rassemblerait comme le déclare Julia de Funès ; leurre ou
piège ?
L’intérêt du travail d’Alain de Benoist est précisément
de mettre en évidence que le rejet de l’identité que Julia de Funès entérine et
justifie dans son livre « le siècle des égarés » provient de tout ce courant
philosophique qui a refusé d’ancrer les idées dans le réel. Je n’en veux pour
preuve que la réponse négative mais non argumentée de Julia de Funès à la
question du journaliste du Figaro évoquant Mistral et la Provence, Cervantès et
la Mancha et plus généralement l’ensemble des identités particulières notamment
régionales qui ont ouvert à l’universel.
Selon elle le réel devrait être une condition de l’existence
mais pas un conditionnement d’où le rejet de l’identité ; un être humain
se définissant par sa liberté et non par son identité.
Mais pourquoi rejeter l’identité ? Pourquoi
faudrait-il s’arracher à son identité pour être libre ? Pourquoi déraciner
la liberté et l’opposer à la réalité de ce qui nous fait ce que nous sommes ?
Pourquoi le réel dans lequel se forge l’identité
serait-il un conditionnement ?
Ces concepts maniés même avec dextérité ne nous
éloignent-ils pas de la vérité ?
Alain de Benoist lui répond de manière pragmatique,
empirique, constructive dans les termes suivants : « nous avons une
identité ethnique, l’identité nationale, une identité linguistique, une
identité culturelle, une identité générale rationnelle, une identité
professionnelle, une identité sexuelle, une identité d’État civil,
éventuellement l’identité religieuse, politique ou philosophique. Toutes ces
facettes ne s’harmonisent pas nécessairement entre elle et, surtout, nous ne
leur accordons pas la même importance. L’erreur serait de croire que l’identité
n’est pas vitale parce qu’elle est floue, ou qu’elle ne peut pas être foncière
est vraiment vitale. Il faut en fait admettre l’un et l’autre ».
Les idées philosophiques qui déracinent l’homme
contribuent à le fragiliser. La liberté selon Julia de Funès qui se construit
dans un rejet de l’identité ou des identités est dangereuse et piégeuse. Elle
est belle dans un livre. Elle est fausse dans la réalité, dans la vraie vie. Il
ne faut pas se gargariser de mots. La modernité nous met des absolus dans la
tête mais nous déracine. Ce faisant elle nous expose à toutes les idéologies et
tous les totalitarismes. En même temps, elle ouvre la voie à des
communautarismes qui consistent comme le constate malgré tout Julia de Funès à
exacerber les identités dans le cadre de la nation. Et comme la nation a perdu
son identité parce que nous avons décidé de la déconstruire, nous ne savons
plus gérer ou réduire les identités collectives qui deviennent des
communautarismes destructeurs.
Gardons les pieds sur terre !
CQFD.
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