Mon confinement est confortable, léger à supporter si ce
n’est la restriction à ma liberté de déplacement et les difficultés à
travailler « à distance ». Je n’ai pas de problèmes matériels vitaux malgré les
soucis inhérents au ralentissement de l'activité économique et à la gestion de la crise à
venir… J'ai beaucoup de chance par rapport à tant de nos concitoyens...
J'ai de la chance par rapport à des familles qui ont moins que le
nécessaire en ces temps de chômage partiel et qui doivent vivre avec de jeunes
enfants dans de petits appartements au cœur de cités déshumanisées ; les
uns sur les autres, avec des adolescents contraints de faire les devoirs à
distance pendant que le petit frère et/ou la petite sœur fait son énième
caprice ; les uns sur les autres pour des parents devant jour après jour trouver des
occupations nouvelles; les uns sur les autres du matin au soir dans 70, 60 voire 50 m², sans pouvoir sortir …
Non il n’y a pas égalité.
Oui la vie confinée est difficile, très difficile pour certains. Et les autres peuvent devenir un enfer,
non plus par l’effet du dérèglement intellectuel d’un philosophe en mal d’identité,
mais parce que la vie confinée se réduit à la confrontation des «moi» sans distance ni
répit, 24h sur 24h, minute après minute, pendant des semaines qui n’ont pas de
fin… L’amour s'y dissout et peut de retourner contre le prochain le plus proche, même chez ceux qui ont encore la
chance de croire en Dieu, tant il doit ainsi être difficile de partager en vérité,
dans la charité! Partager quoi? Quoi de plus que ce qui l'est déjà par la force de la cohabitation? Aimer? Comment renouveler l'amour quand on subit la présence de l'autre sans recul, sans distance, en permanence? Je n'arrive pas à imaginer ce que je deviendrais si tel était mon lot quotidien depuis 3 semaines... La misère y prend une
dimension dont nous n’avons pas l’idée. Elle exerce une pression permanente. Elle
prend le dessus sur tout. Elle envahit chaque journée, chaque heure, chaque minute, chaque seconde...
Je me dis alors que ceux qui nous expliquent que cette
épreuve est l’occasion d’un retour introspectif sur soi - une chance!- ne savent pas ce qu’ils
disent, sauf à s’adresser à une petite minorité de privilégiés lecteurs du Figaro ou de Libération.
J'ai de la chance par rapport aux personnes âgées enfermées dans les chambres
de leurs EHPAD sans pouvoir embrasser leurs enfants et petits-enfants, ainsi
privées de ce qui constituait les seules joies de leurs journées déjà
interminables...
Que dire de ceux qui ont un proche malade, seul, séparé d’eux, anonyme parmi les services d'urgence et de réanimation ? Et de ceux qui ont perdu un père, une
mère, un mari, une épouse, un frère, une sœur qu’ils n’ont pas pu accompagner
dans ses derniers moments et pour qui les obsèques seront un moment de solitude
et d’abandon alors qu’ils auraient tant besoin de la tendresse de leurs proches et
des secours de la religion?
Comment oublier le corps médical dans son ensemble qui au début de cette crise sanitaire protestait à juste titre à l’encontre de leurs conditions de travail ?... Ces infirmières qui comme les médecins font plus de 60 heures de travail par semaine alors que la CGT décide de faire grève parce que certaines entreprises se sont vu reconnaître le droit de faire faire de tels horaires à leurs salariés de manière encadrée et rémunérée… Il y a les héros et les indécents…
Quelle chance ai-je... Et je me plains…, j'ose me plaindre.
Voilà… je voudrais savoir exprimer ma compassion en même temps que mon admiration. Je
voudrais vous inviter humblement à penser à tous nos déshérités et à vous unir à tous ceux qui n’ont pas la
chance de vivre le confinement dans des conditions dignes et humainement supportables, à ceux qui
pleurent, qui souffrent, qui se sacrifient... Vœu qui prend tout son sens en ce Dimanche de la Passion de NSJC, premier jour de la semaine Sainte!
Ce soir je suis incapable de mêler ma plume au brouhaha
des donneurs de leçons dont je mesure le caractère dérisoire pour ne pas dire la "c......e". Aussi afin d’essayer de sourire avec vous, car il
semble que ce soit la thérapie préconisée non pas contre la « connerie » -appelons-la par son nom...- mais contre l’enfermement, je vous propose de visionner une vidéo qu’un ami
très cher m’a adressée et que j’ai reçue comme une dédicace à la suite de mon
dernier billet…
Merci pour cette prière. Oui, j'ai bien écrit une prière, car se pencher sur le sort de son voisin, c'est déjà implorer Dieu de lui accorder sa bonté.
RépondreSupprimerEt dans cette période si difficile comment ne pas remarquer que l'idéologie dominante n'a pas perdu une seconde pour donner libre cours aux truismes habituels : ainsi, il nous est suggéré qu'un rassemblement évangélique en Alsace serait (la seule) responsable de la fulgurante propagation du virus. Des chrétiens ! Personne n'oserait fustiger tout autre rassemblement de personnes alors qu'il y en a eu de nombreux en fin février et début mars. Bien sûr, on passe sous silence toutes les réunions d'entreprises durant lesquelles il a été imposé la promiscuité avec des personnes revenant de zones où sévissait déjà le virus. Il aura fallu 3 semaines pour que la Ministre du Travail s'offusque (enfin) des conditions de travail chez Amazon où les salariés doivent travailler sans possibilité de respecter la distance indispensable de l'un vers l'autre…
On apprend au passage qu'Amazon est un service bien plus essentiel pour la nation que la poste : depuis 3 semaines, il est quasiment impossible d'envoyer ou de recevoir une lettre recommandée.
On se prend donc à rêver que le COVID 19 puisse être l'occasion de remettre les pendules à l'heure… Rêve utopique évidemment.