dimanche 12 décembre 2021

ET SI ON PARLAIT DE LA CAUSE ANIMALE?

Quelle est la place de l’animal dans le monde ? Quelle doit être l’attitude de l’homme par rapport à lui ?


Telle est la question du sens profond de la nature et par voie de conséquence de la nécessité d’une écologie non dévoyée.

L’écologie a été préemptée par la gauche. La cause animale par les animalistes. Ce faisant, par suite des excès humains libérés de toute contrainte grâce aux progrès de la technique, ces causes pourtant naturelles et indispensables à la vie de l’homme sur terre sont devenues sujets de clivages, d’oppositions idéologiques. C’est l’un des travers de notre époque que de vouloir faire des catégories, cliver, opposer…

Nous aimons les animaux de compagnie avec lesquels nous avons une relation ludique et affective. Nous acclamons ceux du cirque comme des athlètes, tant qu’ils peuvent encore être mis en scène. Nous admirons ceux, sauvages, que nous tentons de préserver comme autant de curiosités et payons pour aller en faire des reportages photographiques. 

Mais nous n’avons plus une relation naturelle, existentielle, vitale, nécessaire avec le monde animal. Nous ne soignons plus l’animal qui va nous nourrir. Nous ne prenons plus soin de l’animal nécessaire collaborateur dans notre travail même dans le monde agricole. Le lien fait de solidarité naturelle qui nous liait aux animaux a été rompu.

Dans un même mouvement de notre civilisation l’animal est devenu un objet comme tant d’autres qu’il faut optimiser pour des raisons économiques (vaches à traire pour le lait, poulets en batterie, canard à gaver etc.) ou un être quasi humain qu’il convient de respecter comme un partenaire reconnu comme un sujet de droits dans nos vies de citadins.

Ainsi par exemple la chasse est-elle devenue un loisir. Elle a été détachée de son côté foncièrement naturel, vital, nourricier. L’homme chasseur n’existe plus sauf dans certains territoires. Le chasseur occidental est une bizarrerie contestée telle une survivance d’une autre époque, dans notre monde qui se voile la face devant l’industrie animalière ou qui s’insurge contre la maltraitance des animaux.

C’est tout naturellement qu’ont surgi des mouvements comme les antispécistes que nous contestons mais qui ne sont que l’aboutissement extrémiste de nos contradictions et de nos paradoxes.

Nous sommes dans l’ambiguïté.

William Golnadel expliquait il y a quelques jours sur le plateau de l’émission CNEWS face à des interlocuteurs moqueurs qu’il ne voulait plus manger de foie de canard en raison des conditions de leur gavage pas plus d’ailleurs qu’il ne voulait continuer de consommer de viande animale.

Sensiblerie mal placée ?

Alain Finkielkraut lui donnerait peut-être la réplique avec son imagerie poétique de l’animal rêvé par un homme moderne anachronique. « Oh là là, qu'elles sont belles, vos vaches ! Qu'elles sont gentilles, vos vaches ! » s’esclame-t-il à la ferme Delargillière. « Mon hôte m'a fait visiter ses installations : ce sont des étables ouvertes sur l'extérieur, les vaches peuvent voir le ciel, même l'hiver. Et puis, dans sa ferme, il n'y a pas de logettes : les bêtes vivent ensemble et, selon l'atavisme qui les pousse à se protéger d'un agresseur éventuel, elles dorment en rond, rapporte-t-il, emballé. Il faut donner le plus possible la parole à ces paysans qui veulent laisser aux vaches la possibilité d'exister en tant que telles, et refusent de sacrifier ce qui est pour eux l'intense bonheur annuel de la danse des vaches au pur et simple principe de la rentabilité. »[1]

Il nous faut aller plus loin que cette allégorie.

Nous avons une manière erronée de poser le problème, de l’aborder et de le résoudre.

Cette question doit se concevoir dans un cadre beaucoup plus large : celui de notre rapport à la nature dans le cadre de la Création.

Mgr Dominique Rey écrit dans son livre « peut-on être catho et écolo ? » que « la crise écologique découle aussi d’une crise anthropologique ».

C’est le fond du problème.

La place de l’homme dans la nature a été dévoyée pour d’innombrables raisons. Il y a bien évidemment les facteurs techniques, économiques qui font que l’homme se croit toujours plus puissant. Invulnérable. Capable de tout solutionner. Les prédictions alarmistes sont tellement lointaines… On ne se sent pas réellement en péril ni concerné. Les ours blancs vont disparaître oui et alors ? Il n’y a plus d’insectes ? Nous continuons de vivre… Les abeilles ? Nous trouvons encore du miel à acheter… La hausse du niveau des mers et des océans ? Nous serons morts avant…. Notre mode de vie ne semble pas devoir être directement remis en question malgré les alertes des uns et des autres. La technique va nous sortir de là… Une prochaine découverte… La science peut tout résoudre…

Il y a aussi des facteurs d’ordre anthropologique et donc religieux. Quelle est la nature de l’homme ? Divine ou pas ? La création en est-elle une ? Si oui, de qui ? Est-elle divine ? Dès lors l’animal est-il une créature de Dieu ? Si oui, comment concilier cela avec le fait qu’il soit au service de l’homme qui peut même le manger après l’avoir tué ? Mais cette capacité que l’homme a d’éliminer l’animal est-elle absolue ou relative ? En clair, le pouvoir naturel que l’homme a de se soumettre l’animal est-il sans limites ? Et s’il doit y avoir des limites quelles sont-elles ?

C’est en répondant à toutes ces questions que l’on peut résoudre de manière équilibrée la problématique de notre nécessaire respect à l’égard de la cause animale. Non pas parce que l’animal est mignon ou fidèle comme nos chiens de compagnie. Non pas parce que nous avons vie de pleurer face à des canards que l’on gave de manière mécanique. Non pas parce que nous avons pitié de ces vaches enfermées dans des conditions optimisées pour qu’elles produisent le maximum d’un lait qui n’a plus de goût. Mais tout simplement parce que l’ordre des choses veut que l’utilisation que l’homme fait de la nature ne soit pas abusive ; qu’elle reste digne. Car n’en déplaise aux âmes sensibles l’animal est utilisé par l’homme. La création est ainsi conçue qu’il peut se le soumettre et que l’inverse n’est pas vrai sauf circonstance exceptionnelle. Mais l’homme n’a pas le droit de faire n’importe quoi. Cela n’est pas de la sensiblerie. C’est simplement du respect, de la dignité. Ce qui n’est pas la même chose !

À ce stade, et avant de conclure, il m’apparaît utile voir même indispensable, de rappeler l’enseignement de l’Eglise catholique dans son catéchisme à ce sujet. Les citations qui suivent sont extraites des numéros 2415 à 2418 de ce catéchisme[2].

« L’usage des ressources minérales, végétales et animaesl de l’univers, ne peut être détaché du respect des exigences morales. La domination accordée par le créateur à l’homme sur les êtres inanimés et les autres vivants n’est pas absolue ; elle est mesurée par le souci de la qualité de la vie du prochain, y compris des générations à venir ; elle exige un respect religieux de l’intégrité de la Création ».

« Les animaux sont des créatures de Dieu. Celui-ci les entoure de sa sollicitude providentielle. Par leur simple existence, ils le bénit et lui rendre gloire. Aussi les hommes leur doivent-ils bienveillance ».

« Dieu a confié les animaux à la gérance de celui qu’il a créé à son image. Il est donc légitime de se servir des animaux pour la nourriture et la confection des vêtements. On peut les domestiquer pour qu’ils assistent l’homme dans ses travaux et dans ses loisirs. Si elles restent dans des limites raisonnables, les expérimentations médicales et scientifiques sur les animaux sont des pratiques moralement recevables puisqu’elles contribuent à soigner ou épargner des vies humaines. »

« Il est contraire à la dignité humaine de faire souffrir inutilement les animaux et de gaspiller leur vie. Il est également indigne de dépenser pour eux des sommes qui devraient en priorité soulager la misère des hommes. On peut aimer les animaux ; on ne saurait détourner vers eux l’affection d’une seule personne ».

Cette Eglise qui a fait de Saint-François-d ’Assise le saint patron de l’écologie ; Saint-François-d ‘Assise dont le cantique des créatures[3] doit être lu et médité :

Cantique des créatures de Saint François d’Assise

Loué sois tu, mon Seigneur, avec toutes tes créatures,

spécialement messire frère Soleil,

par qui tu nous donnes le jour, la lumière :

il est beau, rayonnant d'une grande splendeur,

et de toi, le Très Haut, il nous offre le symbole.

Loué sois tu, mon Seigneur, pour sœur Lune et les étoiles :

dans le ciel tu les as formées,

claires, précieuses et belles.

Loué sois tu, mon Seigneur, pour frère Vent,

et pour l'air et pour les nuages,

pour l'azur calme et tous les temps :

grâce à eux tu maintiens en vie toutes les créatures.

Loué sois tu, mon Seigneur, pour sœur Eau qui est très utile

et très humble précieuse et chaste.

Loué sois tu, mon Seigneur, pour frère Feu

par qui tu éclaires la nuit :

il est beau et joyeux,

indomptable et fort.

Loué sois tu, mon Seigneur, pour sœur notre mère la Terre,

qui nous porte et nous nourrit,

qui produit la diversité des fruits,

avec les fleurs diaprées et les herbes.

Loué sois tu, mon Seigneur, pour ceux

qui pardonnent par amour pour toi ;

qui supportent épreuves et maladies :

Heureux s'ils conservent la paix,

car par toi, le Très Haut, ils seront couronnés.

Loué sois tu, mon Seigneur,

pour notre sœur la Mort corporelle,

à qui nul homme vivant ne peut échapper.

 

Tout est une question d’équilibre. Un équilibre à rechercher autour d’un fléau qui doit être comme celui de la balance, entre-deux, celui de la mesure.

Mais à partir du moment où l’homme ne se respecte plus lui-même, comment peut-on rétablir un ordre naturel des choses ?

Au risque de choquer je finirai en évoquant le double fait qu’à partir du moment où l’homme est encore capable de tolérer l’esclavagisme des enfants dans nombre de pays comme l’Afghanistan qui est à nos portes, ou qu’il n’est pas capable de résoudre son problème de reproduction et de sexualité autrement qu’en tuant l’enfant qui est dans le sein de sa mère et qu’il est incapable de reconnaître qu’ainsi il commet un crime, , il n’est pas envisageable qu’il soit également capable d’aborder sa relation avec la nature conformément à un ordre naturel des choses.

Oui le problème est au cœur de l’homme…

Semper idem !



[1] https://www.marianne.net/societe/alain-finkielkraut-danse-avec-les-vaches

[2] https://www.vatican.va/archive/FRA0013/_INDEX.HTM

[3] https://croire.la-croix.com/Definitions/Figures-spirituelles/Saint-Francois-d-Assise/Le-Cantique-des-creatures

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