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es paradoxes de « Charlie »
nous aveuglent. Le souci de défendre la liberté d'expression et le droit au
blasphème ainsi que notre élan compassionnel nous ont jeté dans les bras de l’idolâtrie
vis-à-vis de Charlie Hebdo d'une manière aussi inattendue qu'incongrue. Au même
moment où nous devons imaginer de nouvelles voies pour l’intégration de nos
amis musulmans cette « Charlie mania » creuse entre eux et nous un
fossé infranchissable. Notre discours sur les valeurs et l’offre civilisationnelle
qui la sous-tendent sont provocateurs, angéliques et intolérants.
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rovocateurs. N'avons-nous
rien d'autre à offrir à nos concitoyens, et en particulier aux musulmans,
« je suis Charlie » ? Leur proposer, que dis-je, les sommer de
s'identifier à cette irrespect crasseux comme résumant la France, n'est-ce pas
les encourager dans le mépris de notre pays et dans le repli identitaire ?
J'aurais préféré qu'on défilât en scandant je suis Descartes je suis Cézanne je
suis Proust je suis Ravel… (Rémi Brague[1]).
Faire croire aux musulmans français que
« Charlie, c’est la France », c’est confirmer dans l’esprit de
beaucoup que décidément ils sont étrangers à ce corps politique. Comment
peut-on se sentir membre de la communauté nationale si celle-ci se choisit pour
symbole ce qui heurte ses croyances les plus sacrées ? …. Exiger qu’un
musulman devienne un bon citoyen en adhérant aux valeurs de la République dont
la pierre de touche est « Charlie », c’est pratiquement l’exclure et
donc le jeter dans les bras des fondamentalistes qui n’attendent que cela. Ne
tombons donc pas dans le piège que les islamistes nous tendent, couper les
musulmans de France de la communauté nationale. (Thibaud Collin[2]). Tout est dit.
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ngéliques. Les dernières déclarations de notre premier
ministre comme de notre président de la république sont caractérisées par un angélisme et un manque total de lucidité.
Bien sûr que les musulmans ne sont pas nos ennemis ! Mais personne n’a le
monopole de la musulmanophilie. Nous ne cessons de proclamer le respect et la
tolérance, le « pas d’amalgame » entre Islam et islamisme, mais nous
refusons de connaître le contenu du Coran et de nombre d’hadiths qui méritent a minima notre attention. Nous devons voir l’Islam tel qu’il est et pas
tel que nous le rêvons… Rémi Brague souligne que : Parler d'islam modéré me semble de toute
façon insultant pour les musulmans. Car enfin, si l'islam est une bonne chose,
alors aucune dose ne sera trop forte. Il y a des musulmans que je ne dirais pas
modérés, mais tout simplement, pour employer un mot qui fera sourire, vertueux…
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ntolérants. Notre laïcisme n’est qu’hypocrisie si ce n’est
un manque total d’ouverture à l’égard de ceux que nous prétendons accueillir. Auteur
de La laïcité falsifiée (La Découverte),
l'historien-sociologue Jean Baubérot explique dans Libération :
<< La loi ne relègue pas la
religion dans la sphère privée, au contraire. Il s'agit de distinguer la
puissance publique (l'Etat et ses représentants) d'une part, et l'espace public
d'autre part qui est l'agora, l'espace de discussion, les lieux où les
personnes privées circulent, dialoguent, ''s'engueulent librement'' comme le dit Daniel
Cohn-Bendit... >> . Jean Baubérot résume ainsi la lettre et
l'esprit de la loi française de 1905 : elle ne refoule pas les religions
hors du forum, mais supprime les liens institutionnels entre l'Eglise
catholique et l'Etat. C'est autre chose que la définition nouvelle, dangereuse
à souhait, que nous proclamait ce matin M. Jean-Louis Bianco* : à
l'entendre, la Laïcité est une philosophie que chaque individu doit professer
pour permettre le « vivre ensemble » ; chacun
d'entre nous est donc tenu de sacrifier à cette déesse. M. Bianco se rend-il
compte qu'il est en train d'instaurer une idéologie d'Etat [3]?
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théisme. Le laïc contemporain est athée, d’un athéisme
prosélyte. Il veut réduire toutes les religions hors du débat public. La Foi
des musulmans engage toute leur vie. Voilà qui nous est inconcevable du haut de
notre fausse conception du progrès et des lumières. C’est ainsi. L’Homme est toujours un animal religieux. Il ne sort
jamais de la religion. Il en change. Pour le meilleur, ou le pire. (Henri
Hude[4]). Respecter les musulmans
exige de faire une place à Dieu dans la cité. La confrontation politique avec
l'Islam est religieuse. L'islam ne connait pas la distinction du spirituel et
du temporel. La charia est insoluble dans la laïcité. Ce que la laïcité a pu imposer au monde
chrétien qui avait inventé les deux glaives et la distinction du spirituel et
du temporel, elle ne pourra pas l'imposer au monde musulman.
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onfrontation spirituelle. Pour relever le défi de la
confrontation proposée par les musulmans nous devrons remettre la transcendance
au cœur de nos valeurs et de notre civilisation. Nous devons nous situer au
même niveau de préoccupation et d’exigence qu’eux. Nos valeurs républicaines,
ancrées dans la laïcité issue de la révolution de 1789, dont Charlie n’est que
la caricature, ne peuvent provoquer chez eux que des réactions violentes d’incompréhension.
L’exigence de vérité passe par une compréhension profonde de l’Islam. S’y
refuser est faire preuve de violence. C’est manquer de la tolérance dont nous
nous gargarisons. C’est une provocation. A l’inverse la lucidité, la vérité sur l’autre, ostracisés comme étant de l’islamophobie !,
ne sont pas une déclaration de guerre de religion. Elles sont les points de
passage obligés de l’intégration. La solution résultera d'une confrontation
culturelle et spirituelle dont nous ne pourrons pas faire l'impasse. C'était ce
qu'avait compris le père Charles de Foucauld. Il fut un précurseur. Un témoin
en avance sur son temps. Des pays comme le Liban en furent l’illustration
jusqu’à ce que la politique internationale y mette le feu, en même temps qu’à tout
le Moyen Orient.
V
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oilà pourquoi le discours officiel actuel relève d'un
angélisme dangereux. Nous vivons la fin d'un cycle. Les lignes bougent. Nous tournons
une page d'histoire. Il faut l'admettre, l'accepter, l'intégrer. Il ne faut pas plus en avoir peur que nous n'avons le droit de méconnaître l'identité de l'Autre. La peur est aussi mauvaise conseillère que la prétention…
[1]
http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2015/01/16/31003-20150116ARTFIG00466-remi-brague-en-france-on-a-le-droit-de-tout-dire-sauf-ce-qui-fache.php
[2]
http://philosophe-chretien.blogs.la-croix.com/je-suis-charlie-une-faute-ethique-et-politique/2015/01/14/
[3]
http://plunkett.hautetfort.com/archive/2015/01/18/le-soutien-de-m-valls-a-la-nouvelle-caricature-de-mahomet-pr-5536412.html#more
[4]
http://www.henrihude.fr/mes-reflexions/50-democratiedurable/361-blaspheme-sacre
Assez difficile de tout admettre dans ce texte, Entièrement d'accord sur la nécessité de connaître "l'autre", mais à condition de réciprocité...
RépondreSupprimerLes religions : elles sont trop souvent prêtes à se refermer sur elles-même avec leurs disciples convaincus ou entérinés... Et certaines sont conquérantes sinon guerrières.
Les bien connaître d'abord .Que de différences pourtant acceptées par des humains identiques biologiquement.
Social : Il faut divulguer ou enseigner cette identité . L'origine commune de tous les humains sur notre terre fait de nous tous des Africains et des émigrés. Pas très bon pour les regroupements créés par la suite, inventant la fonction tribale transformée en des pays différents où la crème des hommes se bat toujours , même avec Charlie .
Problèmes : nous gardons dans nos inscriptions génétiques, l'instinct de survie et de conquête de l'espace vital. Que la politique exploite. Autre point négatif pour la paix.
La fin du cycle humain n'est pas encore proche. Tout au long des millénaires, la progression exponentielle de la complexité de l'organisme humain, celle de la population, et donc celle des risques, devraient nous mener à une limite insupportable pour tous, voire explosive. Cela calmera peut-être un moment, le jeu cruel de la civilisation , pour ensuite recommencer de plus belle, avec bien sur un jour l'extinction de tous , faute de nourriture , par exemple. - Ou pire... Et gare à l'instinct de survie ...
Janclode