La peur et l’angoisse sont à l'ordre du jour. Le courage semble réservé à une élite…
La peur et l'angoisse sont très proches. Mon propos n'entrera pas dans leur distinction.
Qu’est-ce que la peur ?
Qu’est-ce que la peur ?
Une réaction irrationnelle et non maîtrisée face à un
événement ou à la crainte de la survenance d’un événement paralysant ou
terrifiant.
Elle peut être individuelle comme collective.
Quelle est la cause de la peur ? L’effroi. La
confrontation à un facteur humain ou naturel bouleversant. Un risque
susceptible de nous atteindre dans notre intégrité physique et morale comme un
tremblement de terre, un attentat, une maladie, ou une épidémie. Il y a aussi la transgression, celle d’Adam et Eve à la suite du péché originel… La confrontation avec l'inattendu, miraculeux et donc la peur de
Pierre à la suite de la pêche miraculeuse de Jésus.
Comment maîtrise -t-on la peur ? D'abord par la confiance. L’enfant
se tourne vers ses parents. Le malade vers son médecin. Le citoyen vers la
police et l’État. Le croyant vers l’Église. La clé de la maîtrise est dans la
domination de la peur. N’avoir plus peur ! Mais aussi dans le courage qui
consiste à transgresser la peur. « La peur est ce qui gronde dans le
courage. La peur est ce qui pousse le courage au-delà du but » (Alain). La confiance et le courage sont liés, tant il est vrai que le second a besoin de la première... Mais l'inverse n'est pas vrai!
Les animaux ont peur. La peur de l’homme a un côté animal
parce qu’elle est réflexe. L’animal combat-il la peur ? Non, il la fuit. Nos animaux de
compagnie ne la dominent pas ; c’est notre aide rassurante qui leur
permet de la vaincre. La confiance donc, pas le courage.
D’où vient le courage ? Aristote nous dit qu’il est « le
juste milieu entre la peur et l’audace ». Il est le fruit de l’esprit
face à la peur, et pas de la seule intelligence.
Qui dit esprit dit spirituel. Saint Jean Paul II lança le
22 octobre 1978 son fameux « N’ayez pas peur !». Il s’agissait pour lui de
s’adresser au peuple chrétien et au Monde sur un plan spirituel… L’homme
moderne n’a plus d’inquiétudes spirituelles. Voilà qui nous amène au tableau
contemporain de la peur et du courage.
Que faisons-nous ? Quelle est notre attitude face à
la peur ?
Les événements actuels sont intéressants. Faisons-nous
appel au courage ? Il est réservé aux soignants et à quelques professions
comme par exemple à une moindre mesure les caissières lorsqu’elles furent
exposées au virus sans aucune protection. Tout est fait pour éviter aux
citoyens d’avoir à faire preuve de courage. Il s’agit de les protéger. Principe
de précaution oblige.
Il n’a à aucun moment été envisagé de mener une politique
du courage face au risque. Cela ne fut même pas une hypothèse. Les discours du
Président de la République ont été marqués par ce paradoxe d’un propos guerrier
et en même temps rassurant et protectionniste. De ce point de vue la récente
interview du Professeur Didier Raoult par BFM a été très intéressante; j'y ai consacré un billet sur BVoltaire. [1]
Résultat ? Notre population a rivalisé de
subterfuges pour combattre l’ennui et tenté d’oublier sa peur, cherchant à se
rassurer alors que s’accumulait autour d’elles les motifs de perte de
confiance. Mais comment pourrait-il en être autrement ? Une politique qui
ne cherche qu’à rassurer entretient le réflexe de la peur et se condamne à l’échec
au moindre indice de contradiction, d’hésitation ou de doute suscité par son
action.
Autre résultat, la recherche de "l’ivresse". L’illustration
en a été fournie par une vidéo de Serge Reggiani récitant un joli poème en
prose de Charles Baudelaire qui a tourné comme bien d’autres sur les réseaux
sociaux[1] :
« Il faut être toujours ivre. Tout est
là : c’est l’unique question. Pour ne pas sentir l’horrible fardeau du Temps
qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans
trêve.
Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu,
à votre guise. Mais enivrez-vous.
Et si quelquefois, sur les marches d’un
palais, sur l’herbe verte d’un fossé, dans la solitude morne de votre chambre,
vous vous réveillez, l’ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à
la vague, à l’étoile, à l’oiseau, à l’horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce
qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle,
demandez quelle heure il est ; et le vent, la vague, l’étoile, l’oiseau,
l’horloge, vous répondront : « Il est l’heure de s’enivrer ! Pour n’être pas
les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous ; enivrez-vous sans cesse ! De
vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. »
Nous sommes loin du courage dont notre poète maudit n’a
pas été un chantre…
Le courage était plutôt chez Alexandre Soljenitsyne dont
le discours d’Harvard le « Déclin du courage »[2] fut un réquisitoire contre
l’Occident alors qu’on attendait une critique du communisme de la part du
plus célèbre des dissidents : « Étant
donné la richesse de développement spirituel acquise dans la douleur par notre
pays en ce siècle, le système occidental dans son état actuel d'épuisement
spirituel ne présente aucun attrait ».
Il se faisait ainsi l’écho d’Antoine de Saint Exupéry qui
écrivait dans sa lettre au Général X[3] : « Je suis
triste pour ma génération qui est vide de toute substance humaine… Il n’y a qu’un
seul problème…rendre aux hommes des inquiétudes spirituelles ».
Or ces mots sont reçus par nos contemporains comme le signe
d’une forme d’impuissance. Dépression, tristesse. Certes..., mais le message et l’analyse
allaient bien au-delà de la mélancolie de leur auteur.
Les témoignages de ces deux immenses écrivains sont ceux de l'esprit qui déclenche, nourrit et entretient le courage.
Les témoignages de ces deux immenses écrivains sont ceux de l'esprit qui déclenche, nourrit et entretient le courage.
Je m’interroge sur le point de savoir si frappés par un
déclin de l’esprit nous ne sommes pas devenus inaptes au courage et si au fond
nous n’avons pas que la politique que nous méritons… Nous sommes condamnés à
faire confiance même si le doute nous envahit !
[1]
https://www.youtube.com/watch?v=ZpKb5I6kxbM
[2]
https://livre.fnac.com/a7616374/Alexandre-Issaievitch-Soljenitsyne-Le-Declin-du-courage
[3]
https://nd-chretiente.com/dossiers/pdf/articles/1994_lettre%20au%20general%20x_antoine%20de%20saint%20exupery.pdf
[1]
https://www.bvoltaire.fr/le-professeur-raoult-persiste-et-signe/
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