Trump n'est pas "notre tasse de thé". Le "black listage" dont il vient d'être victime doit néanmoins nous interpeler. Je remercie mon ami le Général Christian RAVIART de sa contribution sur ce sujet de haute importance.
« Trump », en anglais, peut signifier ‘atout’, ‘gagner’, mais aussi ‘trompeter’…
En matière de « gagne » et de « trompette », le président des USA sortant, Donald Trump, après avoir remporté contre toute attente les élections en 2016 sans doute grâce à une carte d’atout maître, nous a habitués pendant quatre années à de nombreux coups de trompette, ou plutôt de tweets…, sa manière à lui de communiquer sans filtre avec ses fidèles, telle une divinité faisant l’économie de son clergé.
A l’issue de la très récente intrusion violente des manifestants pro-Trump au sein du Congrès, le compte Twitter du président Trump a été fermé.
Commentée de toutes parts, cette décision d’exclure le président des USA de ce réseau social qui, bien que ne faisant pas partie des GAFAM[1] au sens strict, procède de la même logique économique, conduit à se poser plusieurs questions:
1/ Les GAFAM sont-ils les nouveaux maîtres du monde ?
2/ De quelle menace cet épisode est-il le signe au-delà de lui-même ?
3/ Quels enseignements convient-il d’en tirer ?
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Les GAFAM, dont la valorisation boursière[2] a été multipliée par deux entre janvier 2019 et juillet 2020, pèsent aujourd’hui environ ¼ de l’ensemble des valeurs composant l’indice boursier américain. Ayant pour la plupart à peine vingt ans d’âge, ils représentent à eux cinq le montant du PIB du Japon, de l’Allemagne ou de notre pays la France ! Chacune de ces entreprises dépasse 1000 Milliards de dollars de capitalisation, soit le PIB des Pays-Bas, classé 17ème pays le plus riche du monde !
Google (90% des requêtes mondiales sur l’Internet, propriétaire de YouTube [première chaîne de vidéo au monde !]), Microsoft qui équipe près de 90% des ordinateurs de la planète, Facebook avec ses 2,7 milliards d’abonnés actifs mensuels sont essentiellement des services utilisés par… les smartphones, et donc Apple… Quant à Amazon, on ne le présente plus.
En moins de 20 ans le pouvoir d’influence des GAFAM est donc devenu écrasant. Les milliards de consommateurs quotidiens, paient en fait leur accès apparemment gratuit à ces services en leur fournissant leurs données, leurs goûts, leurs habitudes, voire leurs vices, datas qui sont vendus aux annonceurs publicitaires et qui génèrent annuellement pour chacun des GAFAM des dizaines (Facebook), voire des centaines de milliers de dollars de chiffre d’affaires (Apple et Amazon : près de 300 milliards).
Twitter, Start-up californienne fondée par Jack Dorsey, ne fait pas partie des GAFAM proprement dits ; sa capitalisation boursière n’est « que » de 40 milliards de dollars, alors que son chiffre d’affaires ne dépasse pas 4 milliards de dollars. Pour autant, le PDG de cette société qui procède de la même logique de l’économie digitale que ses « grands frères », n’a pas hésité à museler l’homme le plus puissant du monde en lui coupant l’accès à son réseau social préféré après quatre années d’une utilisation forcenée qui ne l’avait aucunement gêné, ce qui au demeurant permet de douter de la sincérité de la raison invoquée pour l’en exclure : risque d’une incitation plus grande à la haine…
Ainsi, la décision de museler « the commander in chief » apparaît-elle participer autant de la manipulation totalitaire que de la puissance économique monopolistique.
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Les GAFAM sont avant tout des sociétés qui font du business. Malgré leurs dénégations publiques, elles ont peu, voire pas de considération pour la protection des sociétés démocratiques. Thuriféraires d’un progressisme exacerbé et multiformes ordonné à la seule recherche du profit, elles ne se sentent en aucun cas responsables des conséquences sociétales de leurs actions et de la diffusion de leurs thèses.
D’après Eric Zemmour (CNews le 11 janvier), Donald Trump, dès son installation à la Maison blanche, a refusé de s’appuyer sur ce qu’il a appelé « l’Etat profond », c’est-à-dire son administration, pour affirmer sa ligne politique, et a jeté les fiches d’éléments de langage sur l’état du monde qu’on lui présentait le matin. Si cela a évidemment dû irriter (euphémisme) son entourage, habitué à prendre en main l’impétrant dès son arrivée aux affaires, cela a sans doute fait le miel de Twitter...
Au terme de son mandat, les doutes sur le déroulement de l’élection ayant rendu difficile la transition entre les administrations descendante et montante, il est vraisemblable que Twitter se soit senti enclin à réviser sa bienveillance pour son célèbre usager, afin de préserver l’avenir, son avenir…
Mais l’épisode Twitter n’est en fait que le signe de cette puissance exorbitante et dangereuse de groupes qui aujourd’hui sont en mesure de faire fi de la réalité des Etats démocratiques, des frontières et des cultures, pour le seul bien de leur chiffre d’affaires et de leur expansion, et qui peuvent abattre les frontières physiques et morales, manipuler les foules, voire les déplacer, foules qui n’ont d’ailleurs plus guère de secrets pour Big Brother, détenteur de la seule vérité, de la vérité historique réécrite, de la pensée unique, de la novlangue, etc.
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Cette situation orwellienne gravissime devrait nous faire réfléchir à la réalité de la menace et aux mesures à prendre…
D’abord, constatons que les pays européens et l’Europe en tant que telle, sont hors-jeu de l’économie digitale portée par les GAFAM et les autres start-up californiennes. On peut le regretter, mais c’est un fait…
De leur côté, les Chinois ont bâti leur système, comparable à celui des GAFAM, et sont en pointe en matière de recherche et développement numérique (5G, Huawei, etc.).
Faut-il que nous continuions sur la voie de ce qui ressemble à un asservissement aux USA et à leurs travers ? Faut-il s’ouvrir à la Chine ? Sans doute pas…
La tyrannie du dollar sur l’économie mondiale est d’ores et déjà avérée, la tyrannie des juges en plein développement, la tyrannie de la bien-pensance une réalité rampante, la tyrannie des minorités et la complicité de certains de nos politiques remplit la coupe. Aujourd’hui le totalitarisme des GAFAM fait déborder le vase par où s’échappe notre souveraineté nationale.
Comment restaurer cela ? Vaste question, immense défi, nécessitant d’abord une prise de conscience sans laquelle aucune ébauche de solution ne saurait être trouvée, et aucun atout découvert dans notre jeu.
Notre patrie est menacée, soyons-en conscients ! Il est vital que nous reprenions en main notre souveraineté, politique, industrielle, énergétique, sanitaire, et que nous protégions voire réhabilitions nos valeurs, notre culture, notre identité, nos habitudes de vie qui n’ont pas grand-chose à attendre de la vie virtuelle…
Peut-être la crise sanitaire en cours a-t-elle fait prendre conscience à certains de nos hommes politiques de la réalité des dangers de la mondialisation et des effets pervers de la finance internationale.
Afin d’assurer cette inflexion salutaire, il nous appartient de placer à la barre les dirigeants en mesure de vouloir et d’assumer cette reprise en main, indispensable à notre souveraineté et à notre renommée.
Christian RAVIART
Général de division (2s)
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