« NOUS AUTRES FRANÇAIS » est un pamphlet écrit par Georges BERNANOS au Brésil entre 1938 et 1939.
Nombre de ses pages sont difficilement compréhensibles sorties
du contexte de l’actualité dramatique de la période précédant la deuxième
guerre mondiale. Elles contiennent des attaques ravageuses notamment contre
Charles Maurras dont la pertinence comme l’intérêt nous échappent pour n’être
plus familiers de leurs débats et des déchirements liés à la condamnation de l’Action
Française par Rome. « NOUS AUTRES FRANÇAIS » est aussi l’expression d’une
colère contre la politique réaliste de l’époque ainsi qu’une méditation sur la
France, son élite et sa bourgeoisie.
Cet essai nous permet de découvrir ce que « LA FRANCE CONTRE LES ROBOTS », sur lequel je reviendrai, révèle avec éclat, à savoir la capacité de Georges BERNANOS à comprendre les lignes de force des développements à venir et des évolutions de notre société moderne . En cela, il est passionnant et incontournable.
L’écriture dont la plume est alerte et vive fait parfois
penser à celle de Charles Péguy même s’il s’agit de prose et non de vers. L’auteur
reprend, développe, accentue, précise sa pensée avec des répétitions en formes
d’arabesques. Ainsi sur le thème de la vérité : « le scandale n’est pas
de dire la vérité, c’est de ne pas la dire tout entière et d’y introduire un
mensonge par omission qui la laisse intacte ». Ou sur celui de l’orgueil
: « il n’y a aucun orgueil à être français » car nous sommes des
débiteurs insolvables nous apprendra Jean MADIRAN quelques années plus tard. De
la même manière qu’il écrit plus loin qu’« il n’y a pas de d’orgueil à être
chrétien… ».
Mais je voudrais m’arrêter à un autre développement qui m’a
paru être particulièrement visionnaire pour avoir été écrit en 1939 tant il
semble avoir été pensé pour nous aujourd’hui dans les années 2020 !
Le refrain en est : « vous avez mis les peuples au
collège ».
On lit : « Rien n’y manque : le professeur figure
sous le nom de chef de bureau, de patron, de contremaître, les pions vont et
viennent dans la cour sous l’uniforme de la maréchaussée, la science contrôle
la santé, protège des épidémies, l’aumônier avec la permission du supérieur, se
tient à la disposition des élèves chaque samedi, officie chaque dimanche. »
… « Votre politique est celle de Monsieur l’économe, votre morale celle du
censeur. »
Je vois dans ces lignes une forme de prémonition et de
diagnostic avant l’heure du mal qui nous ronge. Georges BERNANOS poursuit « de
l’élite française formée par vos soins vous avez fait une élite de pions, de
chacun de vos hommes dignes un pion en puissance ».
Et plus loin encore : « pas de controverse avec les
professeurs ! Tel sera tôt ou tard le mot d’ordre des dictatures. Rien
ne leur est plus facile que de s’accorder sur les principes, puisqu’ils
tiennent les principes pour rien » …
Son analyse s’appuie sur le fait que l’injustice est dans
l’homme et que « l’homme peut guérir de tout, non de l’homme ». L’homme
est central, au cœur de la politique. Il est l’origine et la fin. L’objet
central que l’art politique doit faire vivre en plénitude.
La politique infantilisante qu’il dénonce a pour
conséquence que « les peuples ont fait de leur désespoir un dieu et ils l’adorent
» ; « le désespoir étant la charité de l’enfer. Il sait tout, il peut tout,
il veut tout. »
BERNANOS refuse de faire la moindre concession par
rapport à la vérité. Elle doit être dite, quoiqu’il en coûte. Le mensonge doit
être refusé, quoiqu’il en coûte. Voilà qui, une fois de plus, nous renvoie à Alexandre
Soljenitsyne. Il constate un vrai renversement des notions : « qui prend l’attitude
respectueuse pour le respect, la dignité pour l’honneur, la docilité pour l’amour
et les révolutions pour des chahuts… ».
Cette diatribe de notre pamphlétaire sur la politique du
collège qui infantilise le peuple, le méprise, lui ment au risque pour finir de
le plonger dans un désespoir qu’il lui fait aimer, nous renvoie à un autre
auteur russe déjà maintes fois évoqué Igor Chaffarevitch qui a identifié dans
le phénomène socialiste une nature suicidaire. Comment ne pas faire le
rapprochement avec cette idée d’un désespoir, charité de l’enfer, adoré par un
peuple soumis ?
Ne sommes-nous pas devenus dociles, désespérés et
anesthésiés du goût et du sens de la vérité ? Il nous manque un Georges BERNANOS
pour nous réveiller, nous redonner le sens de l’honneur indissolublement lié à
l’exigence de vérité et au refus du mensonge seuls sources possibles de la
charité et de l’espérance ; car « on ne fait pas son salut par
omission ».
Honneur, Vérité, Liberté !
RépondreSupprimerCR
quant a moi c’est un ete avec Jankelevitch et Cynthia Fleury » ne manquez pas votre premiere matinee de printemps «
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