Mon billet de ce soir est un clin d’œil à quelqu’un qui se reconnaîtra.
Et alors ?
Je suis souvent tenté de mettre le doigt sur ce qui va mal ;
peut-être l’avez-vous remarqué ?
Ce soir j’ai décidé de me livrer à une forme d’introspection déstabilisatrice à vocation thérapeutique!
- Demain la crise financière … Et alors ?
- Demain la guerre atomique … Et alors ?
- Demain la planète se sera réchauffée faisant disparaître des centaines d’espèces … Et alors ?
- Demain l’homme robot téléguidé par l’IA … Et alors ?
- Demain la France islamisée … Et alors ?
- Etc...
Sommes-nous condamnés à l'impuissance et au désespoir ? A
guetter l’arrivée de l’Apocalypse ?
Paradoxe d’une conjonction entre les effets de l’information permanente et du tout démocratique. Paradoxe de « l’électeur-débatteur » qui se croit tout puissant grâce à la caisse de résonnance médiatique et des réseaux sociaux et qui s’épuise à force de twitter, de publier, de partager, de se scandaliser, de s’outrer ou d’applaudir et de licker.
Le débat permanent nous étreint, nous passionne, nous angoisse et nous immobilise. Il fait de nous des commentateurs, des faux experts et des dirigeants de salon prétentieux mais sans aucun pouvoir, si ce n’est celui de s’exprimer et de juger. Nous commentons les faits d’actualité par procuration, regardant les émissions de la télé de notre choix, applaudissant les journalistes ou éditorialistes de partis pris que nous avons choisis, renforçant l’esprit de chapelle et demain le communautarisme.
Nous devenons ce que nous
critiquons. Nous tournons en rond. Stérile. Diabolique ?
Ne faisons-nous pas ainsi exactement ce que nos
gouvernants installés qui vivent du système attendent de nous ? Ils nous
occupent et nous nous laissons faire. Pendant tout ce temps nous n’agissons
pas….
La démocratie, la généralisation des médias d’information,
la conversation sur des réseaux qui ne sont que des miroirs déformants, ont anesthésié
les citoyens.
Mais pourquoi : « Et alors » ?
La formule peut sembler désabusée et provocatrice. Signifie-t-elle
que l’on accepte et que l’on cautionne tout ? Que l’on se moque de tout ?
Non. Cette interjection interrogative acte le fait
qu’il y a des événements sur lesquels nous n’avons pas de prise ni d’influence
directe, quoi que nous en pensions (exemple la guerre en Ukraine). Elle conduit en revanche à une question qui est d’une actualité cruciale : Existe-t-il un chemin, même modeste,
pour reprendre la main et transformer ce qui peut l’être à notre niveau ? Telle est la voie thérapeutique que je me suggère.
Prenons des exemples.
La question technologique.
Elle concentre à la fois nos espoirs et nos angoisses. L'intelligence artificielle
est un exemple frappant. Promesse de progrès spectaculaires – dans la médecine,
l'éducation ou encore l'industrie –, elle est aussi porteuse de nombreux
risques. Qui contrôle réellement ces technologies ? À quelles fins
servent-elles ? L'IA est-elle un simple outil ou un levier de domination
dissimulé ?
Faut-il, par prudence, renoncer à l'innovation ?
Certainement pas. L'histoire nous enseigne que tout progrès peut être un bien
ou un malheur, selon l'usage qu'on en fait. La prudence est donc essentielle,
mais elle ne suffit pas. Pour éviter que l'outil ne se transforme en piège,
nous devons encadrer son usage par des principes éthiques clairs et une
vigilance.
La technologie soulève aussi une question plus profonde :
celle de notre humanité. En déléguant nos tâches, nos décisions et peut-être un
jour nos valeurs à des machines, risquons-nous de perdre ce qui fait de nous
des êtres libres et responsables ? La technologie, loin de nous définir, doit
rester un moyen au service de finalités humaines. C'est à nous de décider de
son rôle et de ses limites, avec discernement. Ne pas céder à la facilité en l’utilisant
de manière irréfléchie. Ne pas rejeter par crainte ou par méfiance ou par peur.
Se donner les moyens de maîtriser avec cette idée que de toute façon, avec ou
sans nous, les progrès techniques ne s’arrêteront pas.
Et alors ? Il
faut avancer, faire avec lucidité et prudence; mais faire, oui, pour ne pas laisser la
place qui nous incombe au niveau dont nous sommes responsables avec les moyens du temps faute de quoi nous serons exclus …
La politique.
Le
sentiment d’impuissance est omniprésent. Les institutions paraissent
déconnectées des réalités, incapables d'agir face aux défis d'un monde
mondialisé. Les grandes décisions semblent prises ailleurs, par des acteurs
invisibles : marchés financiers, multinationales, ou encore algorithmes de
gouvernance automatisée.
Renoncer à agir revient à abandonner le terrain à ceux
qui travaillent pour leurs propres intérêts, souvent au détriment du bien
commun. "Faire avec" pourrait apparaître une forme de démission. Mais
c'est peut-être, au contraire, un appel à une action humble et pragmatique.
Cela ne signifie pas tout accepter, mais travailler à l'intérieur de ce
système, aussi imparfait soit-il, pour en changer
Comment peser réellement dans un système qui semble
verrouillé ? Peut-être en redécouvrant la vertu politique dans son sens
originel : servir le bien commun. Cela suppose des choix courageux, un effort
de discernement, et une persévérance à travailler localement, là où notre
influence est réelle. Si nous cessons de tout attendre d'en haut, nous pouvons
commencer à construire, pierre par pierre, un modèle alternatif qui donne du
pouvoir à la base.
Et alors ?
Agir. Cesser de perdre son temps et son énergie à palabrer de manière stérile.
Mobiliser son temps pour agir concrètement et effectivement en dehors, à côté,
du jeu du pouvoir qui n’attend que notre bulletin de vote en forme d’agrément.
L'écologie.
Elle est sur toutes les
lèvres. La planète suffoque, les glaciers fondent, les espèces disparaissent à
un rythme effarant. Les inondations submergent les zones habitées. Nous nous
alarmons, organisons des sommets, signons des pactes... Mais tout cela ne
semble être qu'un théâtre d'ombres. Pourquoi ? Parce que nous prenons le
problème à l'envers.
Nos écologistes, malgré leurs discours enflammés, ne
semblent pas animés par une véritable écologie. Leur approche est souvent
technocratique, obsessionnellement focalisée sur les symptômes, tout en
inévitable d'affronter soigneusement la cause première : un mode de vie
déconnecté des réalités naturelles. Nous posons des emplâtres sur des jambes de
bois, réparons des fuites que nous avons nous-mêmes provoquées, et multiplions
les "solutions" qui, à leur tour, génèrent de nouveaux déséquilibres.
Nous avons fait de l'écologie un catalogue de mesures
correctives sans jamais interroger les fondements de notre relation au monde.
Cette écologie superficielle refuse de remettre en question l'essentiel : notre
rapport à la création. Nous traitons la nature comme un objet, un réservoir de
ressources à exploiter ou à "sauver", mais rarement comme un bien
commun qu'il faut habiter et respecter. Ce paradoxe atteint son apogée
lorsqu'on nous propose des innovations prétendument vertes – énergies renouvelables,
batteries électriques – qui, sous leur apparente vertu, cachent souvent des
impacts environnementaux.
Et pourtant, une vraie écologie ne peut se contenter de la
pose de rustines sur les dégâts causés. Elle exige une révolution intérieure.
Revenir à une simplicité volontaire, repenser nos priorités, réapprendre à
vivre en harmonie avec la création. Cela ne signifie pas renoncer au progrès,
mais en faire un allié humble et respectueux, subordonné aux lois naturelles et
au bien.
Et alors ? Être
écolo au plein sens du terme, dans l’ensemble de l’acception et faire
comprendre autour de nous ce que signifie une écologie pleinement humaine.
Le spirituel.
Dans
ce contexte troublé, la dimension spirituelle prend une importance cruciale. La
crise actuelle n'est pas seulement politique ou économique : elle est avant
tout une crise de sens. Beaucoup se sentent déracinés, perdus dans une société
qui valorise la productivité et le matérialisme, mais qui peine à offrir une
vision de l'homme.
La religion, autrefois source d'espérance, est contestée
et « mise à toutes les sauces ». L'Église catholique est ébranlée par
des scandales, et la sécularisation continue de gagner du terrain. Pourtant,
c'est précisément dans ces moments de trouble que la foi peut retrouver sa
force. Elle ne repose pas sur des institutions humaines faillibles, mais sur
une vérité intemporelle : l'appel à se dépasser, à aimer, à s’oublier et pourquoi
pas à accepter le sacrifice sachant qu’il est le lot de bien des chrétiens
aujourd’hui en Afrique ou au Pakistan pour ne citer qu’eux. A ce sujet je
relisais dans l’excellent dernier numéro de France Catholique le récit
bouleversant des carmélites de Compiègne et de la manière dont elles ont
accepté et vécu leur sacrifice imposé par les révolutionnaires français au nom
des mêmes idéaux que ceux dont nous nous faisons en permanence des gorges
chaudes …
Et alors… que faire ?
Sommes-nous condamnés à osciller entre résignation et
colère, entre espoir naïf et cynisme désabusé ? Je ne le crois pas. Le monde
n'a jamais été parfait, mais il n'a jamais arrêté de se transformer. Si
"tout a toujours été très mal", comme l’écrivait si justement Jacques
Bainville, cela ne veut pas dire qu’il faut sombrer dans le catastrophisme ou
dans un pessimisme qui a malgré tout étreint de grands hommes ; je pense
par exemple à Stephan Zweig, à Montherlant, à Dominique Venner, pour ne citer
qu’eux.
Antoine de Saint-Exupéry écrivit dans Terre des hommes :" être homme c’est précisément être responsable. C’est sentir en posant sa Pierre que l’on contribue à bâtir le monde et que l’on s’unit à lui." Celui qui « détestait son époque » de « toutes ses forces » (la lettre au Général X) nous ouvre la voie ; il nous montre la direction devant laquelle il nous faut modestement placer notre résolution.
Nous avons le choix de l’action plutôt que de la palabre.
Nous pouvons poser nos pierres, ici et maintenant, pour bâtir un monde plus
juste et plus humain. Sur le plan politique, cela passe par un engagement
sincère pour le bien commun, à commencer par des actions locales. Sur le plan
spirituel, par une quête de sens qui nous pousse à dépasser nos égoïsmes pour
œuvrer à quelque chose de plus grand que nous-mêmes. Sur le plan technologique,
par une vigilance éthique qui garantit que l'innovation reste au service de
l'homme et non l’inverse.
La vraie question n'est pas de savoir si tout va mal, et
si ça va continuer, mais ce que nous choisissons de faire à notre niveau dans
nos vies, ce qu’il est possible de faire. Ne pas se laisser entrainer par la
vague critico-sceptique ; ne pas se laisser inhiber par la tentation
permanente de ce système dont les caractéristiques sont la complexité qui
décourage et paralyse, le bruit qui annihile et la fausse croyance en l’utilité
d’un débat stérile.
Et alors ? Agir ! Faire ! Dans le système
en essayant d’être des pôles de référence et de stabilité.
Si nous agissons avec foi, courage et discernement, nous
pourrons peut-être faire naître une espérance là où à vue humaine tout semblait
perdu.
Il n'y a plus qu'à se soigner et à persévérer!
Merci Bernard pour la hauteur de tes points de vues et ton 'balayage' de partis pris que je partage ; ne rien lâcher sur nos valeurs ; tjrs nourrir notre quête de sens. M.C
RépondreSupprimerLucidité parfaite
RépondreSupprimerMais il faut trouver une solution à l'effondrement général , en cours , de la Civilisation Judéo-Chrétienne
L'Espoir ne suffit plus comme "raison de vivre , ou de mourir "
Merci!! AB
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