dimanche 9 janvier 2022

QUI EST RESPONSABLE ?....

Le débat provoqué par les dernières déclarations d’Emmanuel Macron sur la vaccination hystérise un débat politique qui n’en avait pas besoin….. Clivantes elles ont « mis de l’huile sur le feu »…. Est-ce bien responsable de la part d’un Président de la République ?

Et si face à une opinion publique troublée, chancelante, en proie au doute le vaccin était une arme politique à manier avec précaution ?


Plusieurs niveaux d'analyse s'imposent au cœur de cette tourmente.

LES NON VACCINES SONT-ILS DES « NON-CITOYENS » ?

Tout grossier que soit le verbe "em......" n’en est pas moins dans le droit fil de ceux de nos Présidents de la République lorsqu’ils ont voulu cliver, provoquer, imprimer l’esprit public. Choquant ? Sans doute au premier degré… mais finalement il n’y a rien de bien nouveau à l’horizon de la sémantique des hommes politiques français.  Cette déclaration est la réplique fidèle mais inversée de celle du Président Georges Pompidou. Emmanuel Macron n’est finalement, mot pour mot, pas en si mauvaise compagnie que cela.…

Plus intéressante me semble être la raison de sa volonté d’emmerder les Français qui ne veulent pas se vacciner et la conclusion qu’il en tire.

Il qualifie ces derniers d’irresponsables car ils abuseraient de leur liberté. Ce faisant ils ne seraient plus des citoyens à part entière. Ils se mettraient en marge de la cité.

La conclusion est impropre et incohérente.

Impropre car la qualité de citoyen est liée à la nationalité. Elle ne peut être enlevée que dans des cas limitativement énumérés par la loi. Le Président utilise des images fortes mais déplacées et inquiétantes de la part de celui qui est le garant de l’unité nationale et le dernier recours de chaque citoyen y compris le plus coupable ; ce qu’incarne la procédure du droit de grâce présidentielle qui voit les grands criminels implorer la mansuétude du Chef de l’Etat.

Incohérente car il conviendrait qu’il en soit de même - en paroles et en actes - pour tous ceux qui causent des troubles aussi graves si ce n’est plus graves à l’ordre public. Or ce n’est pas le cas ; notre République se targue même de reconnaître les droits civiques à ceux qui enfreignent ses lois jusqu’à Salah Abdeslam qu’elle juge comme n’importe quel autre citoyen avec tous les droits attachés à cette qualité. Alors: deux poids, deux mesures? Simple diatribe? 

Des mots, toujours des mots... mais des mots qui trahissent et qui laissent des traces....

Au-delà de cette conclusion excessive, la question est de savoir si les non-vaccinés sont irresponsables et abusent de la liberté de ne pas se vacciner qu’on leur a laissée jusque-là.

LE REFUS HYPOCRITE ET CYNBIQUE DE LA VACCINATION OBLIGATOIRE.

Notre État n’impose pas la vaccination obligatoire.

Ecartons tout d’abord la tentative de justification du premier ministre au micro de JJ Bourdin consistant à dire qu’imposer le vaccin reviendrait à vouloir recouvrer des amendes ; elle relève de l’anecdote voire du ridicule, mais avec ce premier ministre-là nous avons malheureusement l’habitude des gaudrioles et autres explications scabreuses…

S’il n’y a pas d’obligation vaccinale c’est parce que le pouvoir ne le veut pas. Le Président de la République en avait d’ailleurs fait une doctrine : pas d’obligation vaccinale. D’autres sont d’un avis contraire. Chacun a ses arguments. Mon propos n’est pas d’entrer dans ce débat.

Par contre il me semble d’évidence que le Président de la République n’est pas logique avec lui-même. S’il pense maintenant -on a le droit d’évoluer voire de changer d’avis en période de crise - que les non-vaccinés font peser un risque sur la santé publique et sur la santé de leurs concitoyens il lui appartient de prendre les mesures qui s’imposent. La première d’entre elles serait la vaccination obligatoire. Il faut être logique, cohérent et aller jusqu’au bout de ce que l’on considère comme étant l’intérêt public. Sauf que l’on touche là les limites du « en même temps »… et que le pouvoir ne semble pas prêt à assumer cette nécessité. Pourtant en temps de guerre un chef ça doit cheffer plutôt que d'emmerder...

Comme certains analystes l’ont déjà souligné cette stratégie est hypocrite et cynique.

Hypocrite elle l'est doublement. Tout d'abord parce que le passe sanitaire est un moyen détourné d'imposer le vaccin. Ensuite parce qu’elle consiste à faire peser sur ceux que l’on montre du doigt la responsabilité de la situation épidémique alors qu’en réalité la gestion de la crise épidémique relève de la seule responsabilité de l’État, comptable pour commencer du délabrement de l’hôpital public.  

J’insiste : la seule responsabilité face à cette épidémie que nous subissons est celle du pouvoir qui a la lourde charge du bien commun même s’il ne s’agit pas ici de dire que ce soit chose facile…. Et il est irresponsable de sa part d'essayer de s’en décharger parce qu’il n’atteint pas les objectifs qu’il s’est fixés.

Cynique elle l'est aussi doublement. D'abord en ce qu'elle consiste à créer une catégorie sociale dont on fait des boucs émissaires à des fins politiciennes et électorales. Ce calcul est condamnable car il ne cherche qu’à servir une stratégie personnelle du Président de la République et en aucun cas celle de la collectivité et de la Nation. Ensuite parce qu'elle tend à entretenir un climat de peur dans lequel la stratégie du bouc-émissaire trouve son explication, alors que l'Etat se doit de rassurer sa population.

Alice Desbiolles a parfaitement illustré ce que je veux dire au micro de Sonia Mabrouk sur Europe 1[1] : « C'est désolant de constater que pour les 20 ans de la loi Kouchner de 2002, qui possède un célèbre article sur le consentement libre et éclairé des individus à recevoir un traitement ou un examen, on en vient à stigmatiser des personnes qui refusent une prophylaxie ».

LE REFUS DE LA VACCINATON EST-IL LEGITIME ?

Il faut ensuite se demander si le refus de la vaccination est légitime de la part de certains citoyens.

Je n’entends pas entrer dans  le refus pur et dur des "anti-vax" car le mouvement de refus du passe vaccinal versus sanitaire contre la COVID 19 n’est pas lié à ce refus de principe de tout vaccin.

Certains invoquent explicitement ou à mots couverts l’objection de conscience. Rien ne semble le justifier en l’état. Je pense par exemple aux catholiques qui ont refusé l’administration de ces vaccins au motif qu’ils étaient le fruit de manipulations génétiques à partir de cellules de fœtus avortés. De ce point de vue la question a été réglée par une note doctrinale de la congrégation romaine pour la Doctrine de la Foi. Il ne semble pas qu’il y ait lieu d’y revenir[2]. Et d’ailleurs comme le faisait remarquer un urgentiste les mêmes qui arrivent aux urgences ne refusent pas les médicaments qu’on leur injecte afin de les sauver alors qu’ils sont de même nature…

D’autres ne sont tout simplement pas convaincus. Le discours qu’ils perçoivent est peut-être brouillé. Notre débat démocratique est tellement anarchique et confus… Mais surtout il m’apparaît que nous avons perdu beaucoup avec la gestion de cette crise sanitaire au niveau national, public, via les ARS, en passant par-dessus les médecins et plus généralement la médecine de proximité avec son humanité et sa déontologie.

« La médecine n'a pas vocation à diviser, mais à apaiser, soulager, faire société. Un document de l'OMS, daté d'avril 2021, sans prendre de position tranchée, mettait en garde vis-à-vis de la vaccination obligatoire. Ce document pointait le risque d'altérer la confiance de la population vis-à-vis de la vaccination en général et vis-à-vis d'autres dispositifs de santé publique. Il alertait sur la mise en péril du contrat social et de confiance d'une partie de la population envers la science les médecins et les politiques. … Je pense que toutes ces histoires de passe sanitaire, de passe vaccinale, de confinement, de restriction, tout ça, ce n'est pas un vocable du champ lexical de la médecine et de la santé publique", déclare l'épidémiologiste en réponse aux déclarations d'Olivier Véran, ministre de la Santé, qui avait alors décrit le passe vaccinal comme un moyen de sauver des vies . Je suis médecin, je suis bien sûr la première à vouloir sauver des vies, à ne pas vouloir dégrader la santé des individus. Mais je pense qu'il faut encore une fois évaluer aussi les politiques publiques et évaluer les dispositifs qui sont mis en place", analyse Alice Desbiolles, estimant que les restrictions sanitaires font "plus de dommages que de bien"[3].

LA CAUSE : LA PERTE DE CONFIANCE.

Toutes causes confondues je pense que le ressort de l’opposition au vaccin, ou plutôt à la politique vaccinale, réside dans la perte de confiance.. Les Français qui refusent de se faire vacciner n’ont pas confiance. Ils n’ont pas confiance dans un pouvoir qui s’est contredit à plusieurs reprises. Ils n’ont pas confiance dans un système qui semble manipulé par des puissances sanitaires et financières. Une excellente illustration en est fournie par le fait qu’aucun des médecins que l’on entend sur les ondes et dans la presse ne se positionne clairement par rapport à ses éventuels conflits d’intérêts à quelques exceptions très rares dont Madame Alice Desbiolles. Il y a de quoi alimenter les cauchemars complotistes….Il est extrêmement regrettable que le pouvoir ne se soit pas attaché à mettre toute la lumière nécessaire sur cette question centrale des conflits d'intérêts eu égard à la puissance des lobbies qui sont à la manœuvre ! 

En réalité, ceux qui refusent aujourd’hui de plier l’échine et de rentrer dans le jeu du pouvoir et de la vaccination manifestent de manière frontale leur refus d’un pouvoir qui pour eux a perdu toute légitimité. 

Nous sommes gouvernés à vue. On le comprend… Mais dans cette mesure le pouvoir doit éviter les stigmatisations. Il est contre-productif de marginaliser et de montrer du doigt les non-vaccinés. Ils pourraient être contagieux autrement que par la transmission du virus…

La désignation des coupables peut être un exercice périlleux…

 

 



[1] https://www.europe1.fr/sante/il-faut-arreter-de-se-focaliser-sur-les-contaminations-insiste-une-epidemiologiste-4086101

[2] https://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_doc_20201221_nota-vaccini-anticovid_fr.html

[3] https://www.lefigaro.fr/sciences/vaccins-une-partie-du-corps-medical-a-quitte-la-deontologie-et-l-ethique-pour-sombrer-dans-la-morale-20220105

3 commentaires:

  1. Je suis d’accord avec ton raisonnement la logique c’est de rendre la vaccination obligatoire. Ne pas le faire c’est une façon de botter en touche, tout l’art du politique c’est de persuader les autres que c’est à cause des antivax que le ballon est en touche.

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  2. Ils pourraient être contagieux autrement que par la transmission du virus…
    Cette dernière phrase est particulièrement importante

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  3. La vraie différence selon moi entre l’obligation déguisée du passeport vaccinal et l’obligation légale, c’est que la seconde entraînerait la responsabilité du gouvernement face aux éventuelles conséquences délétères du vaccin ARN.
    Je rappelle à cet égard que le contrat passé entre Pfizer et le gouvernement dédouane le premier de toute responsabilité en cas de problème…
    Des lors on comprend mieux le cynisme de cette non-décision !!!

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