Quels vœux pour 2022 ... s’agissant de tout ce qui a rapport avec le débat sur la chose publique, la « res publica », et … accessoirement … avec la future élection présidentielle ?
Vain ? Difficile ? Sans intérêt ? Pourquoi s'échiner à écrire comme tant d'autres? Alors
que les enjeux semblent si essentiels, craignant de sombrer dans les ornières lassantes de la répétition, l’encre de ma plume séchait jusqu’à ce
que deux hommes m’aident dans ma réflexion prospective ; Michel
Onfray, philosophe et Michel Maffesoli, sociologue.
Voici les liens des interviews dans lesquelles vous retrouverez
les sources d’inspiration de ce billet :
Michel Onfray développe avec insistance et récurrence un discours pessimiste. Il considère que notre civilisation est moribonde. Pour lui il est impossible de la sauver comme il est devenu impossible d’aimer la France alors que pour lui être français se résume en cet amour. Il constate que les minorités sont paradoxalement devenues majoritaires et totalitaires selon l’équation de Tocqueville. À l’interrogation d’un journaliste il répond qu’il nous faudrait un magicien car il ne croit pas à l’homme providentiel pour succéder à « Foutriquet » (ce sont ses termes !) ; par contre il croit au peuple providentiel. Cette formule a suscité mon intérêt. J’y ai vu une source d’espérance au cœur de cette analyse pourtant si désespérante. Je ne suis pas proudhonien comme lui. Je ne pense pas non plus que le peuple puisse se gouverner seul et résoudre une pareille impasse politique et civilisationnelle sans le soutien d’un État. Pour autant l’idée que le peuple détient les clés et qu’il est capable de provoquer une réaction salvifique est pertinente. Elle me semble pleine d’avenir même pour quelqu’un qui ne croit pas nécessairement aux vertus du système démocratique.
Michel Maffesoli vient d’écrire un livre intitulé l’ère des soulèvements. Il diagnostique un
divorce entre le peuple et une élite en déshérence. Pour lui, nous sommes dans
une période intermédiaire marquant le passage d’une époque qui se termine à une
autre qui sera un recommencement (les époques durant plusieurs siècles et les
périodes quelques décennies). S’il parle de fin d’un monde il la distingue de
la fin du monde. Il affirme que l’élite en perdition tente d’entretenir le
mythe progressiste de l’époque dont elle est l’un des trois piliers avec l’individualisme
et le rationalisme. Il considère que ne se reconnaissant plus dans l’offre de l’élite
qui n’a plus ni philosophie, ni idées, ni doctrine à lui proposer, le peuple
qui veut continuer de vivre sera à l’origine d’un processus d’ordre
révolutionnaire c’est-à-dire de retour à un ordre fondé sur des bases
naturelles et réalistes. Cette analyse est positive car une telle révolution ne
serait pas nihiliste ; ce qui rejoint l’analyse selon laquelle une
renaissance succède à une révolution ; phénomène illustré dans notre histoire
récente par l’avènement du consulat à la suite de la révolution de 1789.
Le pessimisme de Michel Onfray se nourrit à la fois d’une
forme de nihilisme et du caractère irréversible de la défection des élites.
Michel Maffesoli qui s’amuse manifestement de son analyse et se refuse à la gravité
ou au catastrophisme, recherche pour sa part ce qui peut nous permettre de
retrouver une adéquation entre ce qu’il appelle le pouvoir institué et la
puissance instituante ; distinction qui renvoie à celle d’A Comte et de C
Maurras entre le pays légal et le pays réel. Il propose de véritables raisons d’espérer,
même si l’inéluctable révolution qui fera passer d’une époque à une autre
pourra être accompagnée de phénomènes violents.
Revenons à 2022.
Ces analyses ne permettent pas d’identifier celui ou
celle qui gagnera l’élection présidentielle. Car comme le soutient Michel
Onfray le président élu sera de toute façon imprégné de l’idéologie de cette
élite qui fait tout pour entretenir son pouvoir en usant de la peur comme le
souligne Michel Maffesoli ; élite médiatique et politique que celui-ci décrit
comme endogame et constituant une véritable caste, dotée de ses acteurs et de ses
perroquets… Ce dont on peut toutefois être certain pour reprendre la formule de
Michel Onfray c’est que ce futur président sera nécessairement Maastrichtien,
et pour reprendre celle de Michel Maffesoli qu’il sera progressiste. Suivez mon
regard…
Il n’y a donc rien à attendre de cette échéance
soi-disant essentielle. Pour ma part, je pense toujours aller au moins deux
fois à la pêche au cours du printemps prochain. À cet égard si certains
pensaient voir dans le candidat Éric Zemmour un homme providentiel force est de
constater avec Michel Onfray qu’il n’aurait pas les moyens de gouverner le pays
conformément à ses analyses, vu que la caste resterait installée aux manettes
de l’État et de ses institutions et qu’il n’aurait pas les moyens de l’en
déloger, sauf à passer par la case … révolution.
Par contre, et je reviens ainsi à l’un de mes dadas…,
mais je suis heureux de constater qu’il s’agit d’un cheval enfourché par des
personnes de bien plus grande compétence que moi - c’est notamment le cas de
Michel Maffesoli - ne pourrions-nous pas espérer que le peuple trouve avec
succès les moyens de faire valoir ce qu’il attend et ce dont il a besoin face à
une élite qui ne lui correspond plus ? Et ceci par la voie de réalisations
concrètes, pratiques, élémentaires, basiques, naturelles à la portée de chacun
? Sous la forme d’une résistance positive, active, renaissante. Une sorte de «
tout sauf le renoncement ». Face à la saturation de ce que Michel Maffesoli
appelle la « forme parti » - ce qui renvoie à l’analyse déjà maintes
fois évoquée de Simone Weil sur les partis politiques – forme gouvernante de ce
qu’il appelle depuis bien longtemps déjà un totalitarisme souple, le peuple a
les moyens de réagir et de faire prévaloir son intérêt. Ce refus actif et
résistant au « système » que dénonce Eric Zemmour et avant lui les Le
Pen …, provoquerait la révolution diagnostiquée par ce sociologue, au nez
et à la barbe d’une oligarchie finissante. Sous quelle forme ? Nul ne peut le
prédire… mais qui aurait prédit comment et de quelle manière le totalitarisme
communiste de l’URSS s’effondrerait en l’espace de quelques mois ?
Michel Maffesoli développe une idée très intéressante dans
l’ordre des moyens susceptibles d’être mis en œuvre : celle d’une synergie de l’archaïque
et du techno développement. Derrière ces mots compliqués son idée est au fond
très simple. L’archaïque incarne les revendications du peuple ; celles des
principes directeurs du « nous » commun, montrés du doigt, stigmatisés
et considérés comme dépassés par l’oligarchie mais vécus comme nécessaires par
le peuple. Le peuple agissant pouvant correspondre au peuple providentiel de
Michel Onfray. Le techno développement ce sont les nouvelles technologies et
particulièrement l’Internet qui constituent des moyens de communication et d’action
à sa disposition, hors de la portée des moyens de contrôle du système endogame
des médias et de la politique. Belle revanche de l’archaïsme sur le progrès !…
Et si l’année 2022 était le début de la fin de cette
période de transition d’une époque à une autre qu’évoque Michel Maffesoli ?
Et si dans un monde qui semble ne plus rien attendre de positif, dans cette fin
d’une époque, l’année 2022 voyait surgir enfin le début d’un mouvement
inattendu, fait de petits riens, mais de ces petits riens essentiels susceptibles
de nous ouvrir la voie renaissante d’une civilisation qui n’en déplaise à
Michel Onfray ne doit peut-être pas mourir ?
Que la providence veille sur la France en cette année
2022 !
Et bonne année à vous tous !
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