L'autorité est remise en cause.
Elle menacerait la liberté.
On ne cesse de nous mettre en garde contre les risques liés à un pouvoir autoritaire.
Liberté et autorité seraient-elles contradictoires, inconciliables ?
Participant à un séminaire sur le thème "le leader face à une situation de crise" j'ai émis à la surprise générale qu'il puisse exister un couple entre ces deux notions.
Mon maître Jean Ousset l'avait théorisé dans un passionnant opuscule dont je vais m'inspirer.
Et pourtant….
Dans le nœud gordien Georges Pompidou écrivit justement: "Il n'y a pas de liberté ni d'autonomie sans l'existence d'une autorité garante de cette liberté". Voilà qui nous met sur la voie car dans cette optique la liberté ne se réduit pas à faire ce que l'on veut sous la seule réserve de celle des autres; elle est sous la tutelle de l'autorité.
Comme déjà souvent souligné sur ce blog il faut d'abord parler des libertés concrètes plutôt que de la liberté au sens abstrait.
Il faut ensuite prendre en compte le constat que plus on a de pouvoir plus on est libre. Plus l'autorité est exercée de manière juste et adaptée aux différents niveaux de pouvoir plus les autres sont libres.
Il en va ainsi du pilote d'un avion par rapport à ses passagers. Mais les libertés du voyageur, par exemple celle d'aller et de venir sont garanties par celle du pilote irremplaçable pour les mener à sa destination en toute sécurité.
On pourrait aussi évoquer les libertés respectives du percussionniste, du premier violon et du chef d'orchestre interprétant un concerto de Beethoven. Sans l'autorité du dernier les deux premiers ne pourraient pas s'exprimer librement dans leurs registres.
Alors quid du couple "liberté-autorité"?
Il est évident que l'exercice de l'autorité ne doit pas dériver en autoritarisme et en totalitarisme. L'autorité ne se conçoit que dans un ordre naturel hiérarchisé. Celle de notre pilote n'est pas contradictoire avec celle du chef d'état qu'il va emmener à son rendez-vous international. Chacun dans sa sphère. Si l'on raisonne en termes de liberté générique, abstraite, de la liberté absolue des révolutionnaires de 1789 ainsi qu'on le fait habituellement, la conciliation de l'autorité du pilote et du chef d'état ainsi que de leurs libertés respectives sera impossible.
Or qui dit ordre ne dit pas nécessairement ordre autoritariste voire totalitaire. Inversement l'absence d'ordre se traduit par l'anarchie. Il en irait ainsi d'un pilote qui déciderait de conduire le chef d'état ailleurs que dans la capitale où se tient un sommet international important remettant ainsi en cause la possibilité pour le second de négocier avec ses interlocuteurs pour le bien de son pays et sa population ….
Comment s'y retrouver?
La première clé réside dans le principe de subsidiarité.
Lors de la réunion à laquelle je faisais référence il est très vite apparu que le leader ne peut conduire son équipe, son entreprise ou son pays sans permettre à chacun d'agir et d'exercer son autorité propre. Le principe de subsidiarité consiste pour chacun à ne pas faire ce que la ou les personnes, qui se trouvent au-dessous de lui dans l'ordre naturel de fonctionnement de sa structure, sont en mesure de faire à leur niveau.
La deuxième clé réside dans le respect de l'ordre naturel des choses et des lois naturelles qui président à la vie du corps social. Le paysan n'est pas libre de semer quand il veut. L'enseignant ne peut pas faire travailler une pièce de Molière à des élèves qui ne savent pas lire. Etc.
Il en va ainsi dans tous les domaines.
Pour finir, prenons des exemples.
Celui des poursuites engagées contre les policiers accusés de meurtre dans l'affaire "Nael". Il va de soi que le refus de réaffirmer les sphères naturelles d'autorité et de liberté du policier et de celui qui est soumis à un contrôle légitime entrainent un climat d'anarchie qui à terme débouche sur un désordre insupportable.
Celui de l'école au sein de laquelle la remise en cause de l'autorité du maître se traduit par une altération des conditions et de la qualité de l'enseignement.
Un autre exemple peut être celui des problèmes posés par la détérioration de nos relations avec l'Algérie. Les démissions des autorités dans l'exercice de leurs devoirs à tous les niveaux de responsabilité se traduit pas des pertes de libertés pour l'ensemble des citoyens concernés directement comme indirectement.
Tout est lié. La liberté et l'autorité le sont. Il suffit de se débarrasser de nos préjugés et présupposés pour le comprendre et le mette en pratique.
On n'y est malheureusement pas…
« Quand la souveraineté du peuple est une souveraineté effective, non un fantôme, les représentants du peuple ne sont pas non plus des mannequins, ce sont de puissants ministres investis de leurs pouvoirs par un souverain agissant. Ils ont reçu du peuple l'ordre de le gouverner et ils doivent lui obéir, c’est-à-dire lui commander. »
RépondreSupprimerHenri Hude - L’éthique des décideurs - Presses de la Renaissance