dimanche 15 février 2015

LA REVOLUTION COMME DANS UN REVE


C
auchemar. Je venais de lire un article de Paul Jorion sur l’effet de cliquet qui interdit à nos systèmes verrouillés de revenir en arrière[1]. Il cite cette récente déclaration du « Chef de l’Europe » Jean Claude Junker pour qui « il ne peut pas y avoir de choix démocratique  contre les traités européens ». J’eus le vertige et fus une fois encore pris d’effroi, confronté à la froide détermination de nos politiques modernes. Comme dans une nuit cauchemardesque… Sans doute pour me défendre mon esprit s’est évadé de cet univers fermé, et a fini par me conduire comme dans un rêve, sous un clair de lune, grâce à une lecture en cours à laquelle je suis revenu comme à une bouée de sauvetage…

P
aradoxes ?  Unité, rassemblement sonnent pour moi comme le rappel du clairon. J’aime l’ordre, parce que c’est une nécessité ; mais ma nature me pousse à l’indiscipline. Je n’aime pas les interdits ; il n’y a pour moi rien de plus insupportable que cet univers aseptisé, policé, uniformisé, « orwellien » dans lequel tout est organisé, préparé d’avance, dicté par une police de la pensée conformiste. Je déteste que l’on m’impose la direction à prendre même si je me laisse volontiers convaincre du bon choix. Je ne crois pas au consensus, mais à la richesse de la diversité. Je ne crois pas qu’une société peut devenir un seul esprit, ce qui ne veut pas dire que la communion ne doive pas être recherchée. Je ne supporte plus ce système qui cherche à nous imposer sa façon de penser tout en nous faisant croire qu’il laisse à chacun une liberté absolue;  sous couvert  par exemple de la liberté d’expression et du droit au blasphème (salut Charlie !), sortes de « hochets » de la bien-pensance.  Car ce sont les mêmes qui par leurs lois et leur politique, si tant que c’en soit encore une… nous refusent les libertés concrètes, quotidiennes ; quand il s’agit après les manifs et les grands discours de permettre à chacun concrètement, d’exister comme une personne, avec une véritable autonomie, dans un espace vital pour lui et les siens, selon ses convictions et conformément aux principes élémentaires de toute humanité digne de ce nom… Ce qui signifie, liberté économique et du travail dans la dignité, liberté pour les familles de préserver leur espace vital, liberté d’entreprendre, liberté de l’enseignement qui ne souffre pas les diktats faussement démocratiques et républicains d’une caste d’apparatchiks totalitaires voulant mouler les enfants selon leurs critères, ce qui veut dire encore la liberté de vivre et de mourir conformément à l’ordre de la nature sans être à la merci de qui que ce soit sauf de Dieu. Ordre et diversité. Principes de subsidiarité et de totalité. Réalisme intégral. Voilà ce qu’on nous refuse au risque de nous étouffer, en nous faisant croire que nous vivons encore après nous avoir transformés en consommateurs, jouisseurs, profanateurs ; en grandes gueules droits de l’hommistes…

M
aître. Je me sens de plus en plus réactionnaire, mais aussi anarchiste, comme Gustave Thibon se plaisait à l’exprimer. Je suis en même temps séduit par les richesses du distributisme chestertonien. Chesterton est un vrai maître pour notre époque. Je suis en train de relire « l’auberge volante » qui démontre que cet immense écrivain et pamphlétaire avait montré la voie à Houellebecq pour son roman « soumission » un siècle plus tôt. Et entre nous il lui est très supérieur….. P. Maxence qui se consacre depuis des années à la diffusion de son œuvre évoque Houellebecq comme un Chesterton triste[2]. Et c’est vrai qu’il est merveilleux de joie dans son écriture comme dans ses idées. Chesterton est tout entier dans « small is beautiful » dont vous trouverez des extraits sur ce blog. Avec cette intuition qui est réservée aux visionnaires, et avec une intelligence aussi acérée que provocatrice,  maniant les aphorismes comme personne, il a senti et dénoncé les maux de notre si cher modernisme et de son frère siamois le progressisme idéologique.

D
istributisme. Sa pensée nous met face à nos contradictions comme à nos insuffisances. Sa dénonciation du socialisme étatique et du grand commerce comme étant les deux pouvoirs qui nous menacent est allée au-delà des justes intuitions du marxisme et a vu, alors qu’ils étaient à peine en germe, les effets pervers de la financiarisation de notre économie. Il a ramené comme à ses origines le mal idéologique planificateur et uniformisateur précédemment dénoncé. Allant au bout d’un raisonnement implacable, il dénonce comme l’erreur fondamentale, le refus de la division essentielle entre le ciel et la terre, entre l’homme et la femme (oui !!!!!, et on ne parlait pas de théorie du genre à l’époque….) nous rappelant le clivage créateur entre Adam et Eve et le clivage destructeur entre Caïn et Abel (sic !). Voilà qui s’appelle penser de manière intégrale, entière, totale, révolutionnaire…

R
évolution. Car il a enfin, été le chantre d’un appel à une révolution par les gens et non pas pour les gens, dont toute l’inspiration est exprimée dans ce texte que j’ai déjà évoqué et que je ne résiste pas à la tentation de vous inviter à le lire à nouveau tant il mérite d’être lu et relu comme une leçon pour toute action politique en vérité :

Avec les cheveux roux d’une gamine des rues, je mettrai le feu à toute la civilisation moderne. Puisqu’une fille doit avoir les cheveux longs, elle doit les avoir propres; puisqu’elle doit avoir les cheveux propres, elle ne doit pas avoir une maison mal tenue; puisqu’elle ne doit pas avoir une maison mal tenue, elle doit avoir une mère libre et détendue; puisqu’elle doit avoir une mère libre et détendue, elle ne doit pas avoir un propriétaire usurier ; puisqu’elle ne doit pas avoir un propriétaire usurier, il doit y avoir une redistribution de la propriété ; puisqu’il doit y avoir une redistribution de la propriété, il doit y avoir une révolution.
Cette gamine aux cheveux d’or roux (que je viens de voir passer en trottinant devant chez moi), on ne l’élaguera pas, on ne l’estropiera pas, en rien on ne la modifiera ; on ne la tondra pas comme un forçat. Loin de là. Tous les royaumes de la terre seront découpés, mutilés à sa mesure. Les vents de ce monde s’apaiseront devant cet agneau qui n’a pas été tondu. Les couronnes qui ne vont pas à sa tête seront brisées. Les vêtements, les demeures qui ne conviennent pas à sa gloire s’en iront en poussière. Sa mère peut lui demander de nouer ses cheveux car c’est l’autorité naturelle, mais l’Empereur de la Planète ne saurait lui demander de les couper. Elle est l’image sacrée de l’humanité. Autour d’elle l’édifice social s’inclinera et se brisera en s’écroulant ; les colonnes de la société seront ébranlées, la voûtes des siècles s’effondrera, mais pas un cheveu de sa tête ne sera touché.

S
emper idem… La vraie révolution commence par un rêve. Ce rêve peut être prémonitoire pour les hommes et les femmes sachant se défier des utopies socialistes et marchandes…

  




[1] http://www.pauljorion.com/blog/2015/02/12/pour-que-leffet-de-cliquet-puisse-jouer-il-faut-le-garder-secret/
[2] http://www.lefigaro.fr/vox/culture/2015/01/07/31006-20150107ARTFIG00339-et-si-houellebecq-etait-un-chesterton-triste.php

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