Après la lèpre populiste notre Président de la République s’attaque
à la lèpre nationaliste. Le sujet est sensible, délicat. Pour preuve ce récent
échange avec un ami sur un réseau social. Alors que j’ai partagé un article sur
le contenu des discours du président ORBAN il m’interpelle ainsi : « Par pitié gardez-vous de ce romantisme noir
! Revenez au message de l’Évangile et méfiez-vous de ceux qui s’en réclament
trop bruyamment ».
Nous ne pourrons pas éluder ce débat essentiel. Mais, comme
trop souvent, il est piégé et dénaturé par des abus de langage et des
contresens historiques.
De quoi parlons-nous ?
L’Europe est blessée et meurtrie par l’usage abusif et
meurtrier que certains ont fait de l’idéal national au cours du XX° siècle. Prudence
donc ; nécessité d’analyses rigoureuses, affranchies de toute idéologie et
de tous a priori, et impératif rejet de l’utilisation des peurs.
Le nationalisme est un concept récent. Il remonte au début du
XXe siècle, avec un enracinement dans la période révolutionnaire et les
événements qui ont marqué le XIXe siècle.
Qu’est-ce que le nationalisme ? Cette question renvoie
immédiatement à une autre : qu’est-ce que la Nation ?
La Nation sert les biens naturels et surnaturels qu’elle a le
devoir de rendre plus facilement accessibles à ses membres. Alors que la patrie
réside dans ce que nous avons reçu du passé la Nation est la communauté vivante
des héritiers de ce passé et des générations qui se transmettent et gèrent l’héritage
commun. Les Nations sont multiples, concrètes. Elles correspondent à des
réalités vivantes construites avec le temps à base d’histoire, de culture et de
politique. À ce titre, si elles ont été amenées à se combattre, voir à s’entre-tuer
et donc à causer du malheur, leur absence, leur inexistence serait encore un
mal bien pire parce qu’il signifierait l’impossibilité pour les humains qu’elles
réunissent au sein d’un même peuple, de se transmettre paisiblement ce qui les
fait eux-mêmes. Rappelons à ce titre encore une fois la formule de sa sainteté
le Pape Jean-Paul II : « la Nation est ce
qui fait en l’homme l’humain ». Jaurès a pu dire que les Nations sont
des faits. Maurras lui répondit qu’elles sont des bienfaits. Ce dernier affirma
même que les Nations sont des amitiés.
À la suite de l’affirmation moderne, posée par Jean-Jacques
Rousseau, des concepts absolus de bonté de l’être humain et d’égalité entre
tous les êtres humains, au-delà de leurs évidentes inégalités naturelles, le
concept de Nation a lui-même évolué. Celle-ci est elle aussi devenue absolue et
égale entre toutes.
Passant ainsi d’un concept concret, relatif, à un principe
érigé en absolu, sa réalité en fut dénaturée. De quelle manière ? Les Nations
peuvent être égales entre elles dans la gestion des rapports internationaux ;
ce qui ne signifie pas pour autant que pour leurs peuples elles soient toutes
égales ou équivalentes. Tout dépend du niveau auquel on se place dans l’analyse.
Je peux reconnaître l’égalité entre la France et l’Italie en tant que Nations
sur un plan international, pour autant la France est meilleure pour les
Français que l’Italie et inversement ; sans pour autant faire éclater la
guerre entre ces deux Nations.
C’est ainsi qu’est apparue une forme de nationalisme idéologique
et dérégulé. Les conséquences ont été rapides. Après les folies napoléoniennes,
il n’aura pas fallu un demi-siècle pour que nous tombions dans un processus
conflictuel d’une nature totalement nouvelle entre les nations européennes.
Tout démarra avec la guerre de 1870. Celle de 14 - 18 n’a fait qu’empirer les
choses avec son désastreux traité de Versailles. Dès cette époque sont
survenues deux idéologies dévastatrices qui ont aggravé le phénomène ; à
savoir la volonté hégémonique du communisme soviétique et l’érection du
nationalisme nazi qui plus qu’un nationalisme était un racisme en ce qu’il
procédait de l’affirmation de la supériorité de la race allemande. Nous savons
ce que cela a donné.
L’honnêteté commande de reconnaître qu’au préalable, malgré
des conflits liés à la constitution des Nations, nous n’avions pas connu dans l’histoire
de montée en puissance d’idéologies hégémoniques de la Nation.
Et alors que l’internationalisme avait manifesté ses limites
comme ses carences avant 1914, la seule solution que nous ayons été capables d’imaginer
après 1945 a été de soutenir, à travers l’ONU, mais surtout la construction européenne,
la constitution d’entités supranationales destinées à se substituer aux Nations
considérées comme des dangers, les « machins » du Général de Gaulle.
Voilà comment une réalité bienfaisante pour l’homme est
devenue la lèpre nationaliste.
Quelles leçons faut-il tirer ?
Tout d’abord qu’il ne saurait être question de sous-estimer
le danger nationaliste. Bien au contraire. Loin de moi l’idée de soutenir que
les mouvements qui se dessinent aujourd’hui en Europe ne puissent pas comporter
des risques d’explosions violentes et dangereuses. Vigilance donc.
Mais d’un autre côté comment pouvons-nous continuer de
vouloir préparer l’avenir en niant la nécessité des Nations, sauf précisément à
entretenir la constitution de mouvements nationalistes de nature idéologique ?
Qu’avec l’évolution du monde et son rétrécissement il ne soit
plus possible de concevoir la cohabitation des Nations de la même manière qu’il
y a 50 ans, un siècle ou deux siècles, c’est une évidence. Pour autant nous ne
pouvons pas faire comme si les Nations n’étaient pas nécessaires aux humains et
à l’humanité. C’est ainsi qu’il n’est pas concevable que l’on puisse continuer
de construire l’Europe contre les Nations et contre la volonté des peuples ;
affirmation dont il est insupportable de continuer d’entendre qu’elle serait un
refus de principe de toute construction européenne.
Nécessité donc d’une part de ne pas faire des Nations un
absolu, une idéologie mais de les reconnaître en tant que besoins de l’homme, et
d’autre part d’avoir la capacité de les faire évoluer avec le monde et dans l’histoire,
de manière pragmatique.
Défendre la Nation, être nationaliste, en ayant à l’esprit
que cette défense n’est pas contradictoire avec le postulat que je viens de
poser, n’est donc pas en soi contraire à l’intérêt de l’humanité et au bien
commun. Et j’accorde à ce titre à nombre de ceux qui aujourd’hui dénoncent les
montées d’un certain nationalisme, le crédit qu’ils ne pensent pas le contraire
de cela. Mais pour autant faut-il qu’ils aient eux-mêmes l’honnêteté de
reconnaître que la défense de la Nation ainsi conçue et définie peut ne pas
être un danger en soi, et qu’elle constitue même une nécessité politique, sauf
à jouer avec le feu et à ce que nos responsables deviennent des apprentis
sorciers.
La question étant ainsi posée il faut analyser la situation
actuelle et la problématique posée par ceux qui entendent nous mettre en garde
face aux replis nationalistes.
Quelle est la cause du réveil nationaliste auquel nous
assistons en Europe ? Il s’agit d’un sentiment d’insécurité face à l’immigration
et au danger que fait peser sur l’Europe le terrorisme islamiste, en même temps
que l’échec évident à la fois de l’ONU et surtout de la construction européenne.
Ce serait une erreur politique majeure que de ne pas admettre
le caractère naturel de cette réaction quelque puisse être par ailleurs l’utilisation
qui en est faite par certains leaders politiques. En clair, les peuples
réagissent face à un phénomène en faisant appel au cadre sécurisant le plus
proche et le plus pertinent pour eux à savoir leur Nation. Il s’agit pour eux
de se défendre face à ce qu’ils considèrent comme une menace extérieure. Nous n’entrerons
pas ici dans le débat de savoir si la menace est réelle, mais il est légitime que
des individus souhaitent être protégés au sein de l’entité politique dans
laquelle ils ont reçu ce qui constitue leur identité et envisagent de
transmettre leur héritage aux générations futures. Et à cet égard le fait de
reconnaître l’existence des frontières d’une Nation n’est pas en soi un péché,
ni une grossièreté historique ou politique. Ne vivons-nous pas dans des maisons
qui nous protègent sans pour autant qu’elles nous isolent ? François-Xavier
Bellamy le développe remarquablement dans son dernier livre "Demeure".
Nos peuples demandent la protection de leur Nation. Leurs
leaders politiques répondent à cette sollicitation. L’instrumentalisation par
ces derniers n’est pas exclue. Mais celle-ci ne serait qu’une conséquence de la
demande légitime et de la nécessité impérieuse d’y apporter une réponse. Ne pas
y répondre ne ferait qu’aggraver la situation d’insécurité actuelle et ouvrir
la voie à des périls encore plus graves.
Ce phénomène est d’une nature totalement différente de ce qui
se produisit à partir de 1870 comme de la crise de 1929. L’Europe n’est pas
soumise à la double volonté hégémonique de deux puissances militaires importantes
comme cela était le cas à l’époque. La montée des nationalismes fut le résultat
à la fois de l’insécurité résultant du traité de Versailles, des bruits de
bottes idéologiques en URSS et en Allemagne.
Notre problème lié à l’immigration procède d’approches différenciées par rapport à l’immigration, à un défaut d’adhésion de certains peuples à la politique voulue par d’autres et d’un divorce entre les peuples et leurs dirigeants face aux conséquences de ce phénomène qu’ils lient à leur insécurité. Si le mot de « grand remplacement » est chargé d’arrières pensées et d’incompréhension, il souligne une réalité de plus en plus mal vécue à la base.
Notre problème lié à l’immigration procède d’approches différenciées par rapport à l’immigration, à un défaut d’adhésion de certains peuples à la politique voulue par d’autres et d’un divorce entre les peuples et leurs dirigeants face aux conséquences de ce phénomène qu’ils lient à leur insécurité. Si le mot de « grand remplacement » est chargé d’arrières pensées et d’incompréhension, il souligne une réalité de plus en plus mal vécue à la base.
Le seul point commun entre notre époque et celle de l’entre-deux
guerres mondiales est que l’insécurité de notre monde se stigmatise de manière
naturelle dans les rapports entre les Nations. L’internationalisme a dans le
passé fait la démonstration de son incapacité à éteindre les foyers bellicistes
dans un contexte de tension historique. L’action politique doit consister à
retrouver la voie de l’amitié entre les Nations. Ce n’est pas en les niant qu’on
y parviendra. Ce n’est pas en les considérant comme une maladie que l’on
soignera les peuples alors qu’ils sont malades d’autres maux que de leur
attachement à leur Nation !
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RépondreSupprimerEt pourquoi donc ? Il n'avait rien d'insultant, ni d'incorrect, et l'absentéisme des députés est un fait
RépondreSupprimerCher Monsieur,
Supprimeril ne répondait simplement pas au thème du blog et n'apportait rien à la discussion abordée; c'est en tous les cas ainsi que je l'ai perçu et compris. Bien à vous