10 ans ! Novembre 2011 ... Je me lançai dans cette aventure éditoriale que je ne sais pas placer sous un autre regard que celui éternellement souriant de l'ange de la Cathédrale de Reims.
Sa contemplation me révèle la joie, la beauté et l'intemporalité de la présence française sur notre sol.
Face à lui tout devient relatif. Sous son regard bienveillant nos aventures humaines se placent dans une perspective qui nous grandit.
C'est dans cet esprit que je vous voudrais vous livrer ce que j'ai retiré de ce parcours chaotique, modeste et somme toute assez confidentiel même si brutalement depuis quelques semaines la fréquentation de ce blog connait une hausse surprenante, comme si avec la proximité de cette échéance la providence avait voulu me procurer un signe d'encouragement.
Sans doute me suis-je souvent répété. Mais ne le
fallait-il pas ? Tant il est vrai que la vie m’aura appris que les problèmes
reviennent non pas « en escadrille » comme les emmerdements selon la
célèbre formule de Jacques Chirac …. mais toujours avec la même essence,
la même substance. Pourquoi ? Parce que c’est l’homme, dans sa nature, dans sa
socialité, dans sa sociabilité, dans ses relations, dans sa vie qui les crée ou
les provoque.
Ce qui dans mes lectures m’aura sans doute le plus interpellé
fut la réponse déjà évoquée -je me répète !... - de mère Teresa à un
journaliste lui demandant ce qu’il fallait changer : « vous et moi ! ».
On en revient toujours là.
C’est l’essentiel.
Le reste n’est que l’écume des vagues, des vagues de
cette vie sociale, cette vie en commun, si merveilleuse, si difficile, si
complexe.
Dualité de la vie. Dualité de l’homme. Ambiguïtés,
paradoxes, écartèlement entre le bien et le mal, la joie et la peine, le beau
et le laid, l’aimer et le mal-aimer ; au plus intime de chacun.
Je crains, de semaine en semaine, de vous avoir donné l’impression
de vouloir refaire le monde avec prétention. En réalité je souhaitais simplement nous inviter à
faire ce que nous propose la grande Sainte de Calcutta.
De manière différente, mais sans doute substantiellement identique
ou au moins similaire, la question est aussi celle posée par Antoine de
Saint-Exupéry dans sa lettre au Général X, elle aussi déjà citée… :
« Ah ! Général, il n’y a qu’un problème,
un seul de par le monde. Rendre aux hommes une signification spirituelle, des
inquiétudes spirituelles, faire pleuvoir sur eux quelque chose qui ressemble à
un chant grégorien. Si j’avais la foi, il est bien certain que, passé cette
époque de « job nécessaire et ingrat », je ne supporterais plus que Solesmes.
On ne peut vivre de frigidaires, de politique, de bilans et de mots croisés,
voyez-vous ! On ne peut plus vivre sans poésie, couleur, ni amour. Rien qu’à
entendre un chant villageois du XVe siècle, on mesure la pente descendue. Il ne
reste rien que la voix du robot de la propagande (pardonnez-moi). Deux
milliards d’hommes n’entendent plus que le robot, ne comprennent plus que le
robot, se font robots ».
Alors, chercheur de vérités ? Vraiment ?
J’ai souvent trop affirmé ma
ou mes vérités au lieu de les faire surgir avec l'évidence qui aurait du les accompagner… Alors, intolérant le chercheur ? Des « a priori » le
prétendu découvreur ? Aurais-je du toujours essayé de simplement suggérer?
Cette question de la vérité est tellement chargée d’arrière-pensées,
de préjugés, de partis pris, de fausses pudeurs, de lâchetés, de maladresses de
présentation, de frustrations qu’il est difficile de ne pas heurter l’autre,
dans sa personne, dans ses convictions, dans ses pensées. Notre monde nous a
tellement liés dans nos vies avec ses structures idéologiques souvent pernicieuses…
Mais je persiste à penser que nous avons besoin de la
vérité, des vérités sur l’homme, sur la vie en société, sur la culture, sur l’art,
sur la religion et qu’il faut persister à les chercher car, comme l’a écrit
Blanc de Saint Bonnet « ce n’est qu’en allant à la vérité que l’on voit
qu’elle existe » ! Nous devons faire cet effort , nous faire
violence et pourquoi pas nous faire mal.
Joseph de Maistre affirmait « il faut croire ce qui a
été cru toujours, partout et par tous » car « l’universalité est le
signe exclusif de la vérité ». Je signe. Plus que jamais…même si l’évidence
de ces vérités se fondent dans un horizon de plus en plus brouillé.
Je ne suis plus le même qu’il y a 10 ans. J’ai appris. J’ai
connu des peines et des joies. Des échecs et des réussites. J’ai lu. J’ai
écouté. J’ai regardé. J’ai compris beaucoup de choses. Je me suis enfoncé dans
le mystère de l’humain, malgré les certitudes affichées…
A l’aide de ses miroirs constitués de veilles, de lectures, d’écoutes, de réflexions, de méditations mon kaléidoscope m’a révélé que ce n’est pas en cherchant à s’adapter, en courant après un monde en évolution, en voulant épouser la réalité mouvante des turbulences de l’humanité et de ses pensées comme de ses caprices, que l’on parvient à avancer, à progresser. Il y a d’ailleurs une grande différence entre avancer et progresser…
Pour résoudre
les équations complexes de nos difficultés personnelles et collectives, il est nécessaire de se référer à la bienfaisante
tradition, non pas par conservatisme, non pas par principe ou par caprice, mais
parce qu’elle seule permet de retourner à l’essentiel et de se détourner de ce
qui dans la modernité et la contemporanéité nous aveugle et nous trompe.
A cet égard, pour ceux que ce sujet intéresse je ne
saurais trop vous recommander le récent livre de Michel Michel à propos du rôle
de la tradition[1].
Elle est l’antidote contre le cancer des idées chrétiennes devenues folles
(selon le mot de G.K. Chesterton), car toutes les folies de nos sociétés et de
notre civilisation ne sont que des idées chrétiennes qui ont été désolidarisées
de la tradition et sont ainsi devenues des hérésies chrétiennes. Voilà qui est
destructeur … dans une civilisation chrétienne comme le démontre Chantal Delsol
dans un récent essai malheureusement vidé de foi et d’espérance[2][3].
Reste à savoir quelle est la bonne tradition. Il faut se
référer à la sagesse. Chercher, se remettre en question, s’en tenir
à ce qui est bon, humainement bon. Juger l’arbre à ses fruits. Imposer que l’on juge l’arbre à
ses fruits…
Aussi, après avoir cité Sainte mère Teresa, après avoir
évoqué la sensibilité extrême d’Antoine de Saint-Exupéry aux drames de son
époque, de notre époque, je ne puis faire autrement, pour célébrer ce dixième
anniversaire que de vous inviter une nouvelle fois -je me répète encore !...-
mais cela fait tellement longtemps que je ne l’ai pas évoquée…- la merveilleuse
histoire de la petite fille rousse de Chesterton.
Dans l'Angleterre victorienne, une loi
obligeait à couper les cheveux des petites filles pauvres, à cause des poux…
Je pars des cheveux d'une petite fille. Ça,
je sais que c'est bon dans l'absolu. Si d'autres choses sont contraires à cela,
qu'elles disparaissent. Si les propriétaires, les lois et les sciences sont
contre cela, que les propriétaires, les lois et les sciences disparaissent.
Avec la chevelure rousse d'une gamine des rues, mettons le feu à toute la
civilisation moderne. Puisqu'une fille doit avoir les cheveux longs, il faut
qu'elle les ait propres ; puisqu'elle doit avoir les cheveux propres, il ne
faut pas qu'elle ait une maison sale ; il faut que sa mère soit libre et
qu'elle ait des loisirs ; puisque sa mère doit être libre, il ne faut pas
qu'elle ait un propriétaire usurier ; puisqu'elle ne doit pas avoir un
propriétaire usurier, il faut redistribuer la propriété ; puisqu'il faut
redistribuer la propriété, nous ferons une révolution…
On ne lui coupera pas les cheveux comme à un
forçat. Non, tous les royaumes de la Terre seront retaillés et découpés à sa
mesure. Les vents du monde seront calmés pour cet agneau, qui ne sera pas
tondu. Toutes les couronnes qui ne vont pas à sa tête seront brisées… Elle est
l'image sacrée de l'humanité. Tout autour d'elle l'usine sociale doit
s'incliner, se briser et s’effondrer ; les colonnes de la société
s'écrouleront, mais pas un cheveu de sa tête ne sera touché.
Ce conte nous apprend la hiérarchie des valeurs et la
nécessité de ne jamais céder à ce qui doit primer. Accepter de renoncer à une
part de soi-même pour le bien de l’autre, pour le bien que l’on a priorisé, pour
le bien que l’on doit prioriser et parfois plus modestement pour un
moindre mal. Apprendre à rechercher le bien commun envers et contre tout.
Voilà...
En route pour une nouvelle décennie ! Si Dieu le
veut !
Semper idem[4]…
[1] https://www.editions-harmattan.fr/livre-le_recours_a_la_tradition_la_modernite_des_idees_chretiennes_devenues_folles_michel_michel-9782343235578-70311.html
[2] https://www.editionsducerf.fr/librairie/livre/19337/la-fin-de-la-chretiente
[3] Voir mon
deuxième billet de ce jour
[4] Cette
signature de certains billets qui doit vous intriguer depuis 10 ans, est une référence filiale et affectueuse à Jean
Ousset - un maître - qui me fit l’honneur de son amitié.
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