Notion ambivalente et paradoxale le secret est au centre de bien de débats, d'énigmes et de drames depuis la nuit des temps.
Notre époque n'y échappe pas, elle qui semble vouloir l'écarter, en prendre le contre-pied, en prônant la transparence à tous bouts de champs.
Telles l’ombre et la lumière le secret et la transparence protègent et remettent en cause le for interne qui est le siège de la conscience. En clair, de la personne. Celle qui doit être au centre du projet politique. Celui de l’État.
La personne se cache et se montre, tiraillée entre son égo et le monde.
Regardons le secret. Par définition il est ce qui est
caché, volontairement enfoui dans un univers privé. Mais s’il ne devait pas
être dévoilé il n’existerait pas. En effet, un secret jamais dévoilé est privé
d’existence aux yeux du monde. Mais quand doit-on le dévoiler ? Pourquoi ? A quelle fin?
La transparence maintenant. Est transparent ce à travers
quoi on voit. En même temps, lorsqu’on exige de la transparence lui c’est que l’on
attend que l’homme montre tout. Alors transparent comme le verre ou nu comme Adam ?
Doit-on tout savoir sur tout ?
L’homme a-t-il droit à son jardin secret ?
Pouvons-nous interdire que l’on dévoile ce que notre
conscience a décidé de garder pour elle ? Pouvons-nous refuser que l’État et
les autorités temporelles de toute nature s’immiscent dans notre vie intérieure
et ses différentes expressions ? Et lorsqu’il serait admis de faire lever un secret
quels moyens peut-on imposer pour y parvenir ?
À n’en pas douter ces questions sont au cœur des débats
de notre société qui continue de chercher le difficile équilibre autour de la poursuite du bonheur
individuel, de l’épanouissement de chacun.
Voilà pourquoi j’ai décidé de m’intéresser tout
particulièrement à ces questions et de tenter d’identifier un certain nombre de
jalons susceptibles de nous aider à nous retrouver dans ce clair-obscur de l’humanité.
L’actualité met en évidence la nécessité de ce travail pour
un citoyen qui comme moi a décidé de faire de la recherche des vérités l’un des
piliers de son enquête personnelle.
Quelques exemples.
La publication du rapport sur les crimes sexuels au sein
de l’Eglise catholique suggère une révision du secret de la confession. Le
prêtre doit-il et peut-il dénoncer ?
Débat qui amène à ouvrir celui sur le rôle et la
légitimité du « for interne » de chacun, ainsi que sur les rapports
si conflictuels en France entre la loi de Dieu et celle de l’Etat et plus
encore, comme me le faisait remarquer un ami, entre ce que l’on peut exiger d’un
homme ou d’une femme et ce qu’on ne peut pas lui imposer au nom d’une légalité
qui n’est peut-être pas toujours inscrite dans un code ….
La récente remise en question du secret professionnel de
l’avocat dans le cadre de l’élaboration de la loi pour la confiance dans
l’institution judiciaire. Le législateur y prévoit d’élargir les possibilités
de porter atteinte au secret de l’avocat. Jusqu’où peut-on aller ? Les avocats ont-ils raison de prétendre que la protection
de leur secret – absolu ou relatif ? - est essentielle pour la protection
des libertés individuelles ?
Nos sociétés évoluent vers toujours plus de transparence,
dans tous les domaines, individuels comme collectifs. Dans sa conception classique
en tant qu’il est une valeur symbolique le secret serait-il un obstacle au
développement des activités des GAFA ainsi que de tous les acteurs des
nouvelles technologies (cf par exemple le projet META). Y a-t-il une troisième
voie possible ? Quels peuvent en être les jalons.
Les affaires de harcèlement en particulier des
adolescents qui défraient la chronique n’ont été possibles que par une vie en
réseau qui écorne et réduit le secret. Quel secret de la correspondance peut-on
imaginer dans une vie digitalisée ?
Le secret a-t-il encore un sens dans le monde
contemporain ? Quelle est son identité ? S’il est en crise, parce que confronté
aux multiples exigences de la transparence, de la démocratie, de la sécurité,
de la communication, des technologies, il n’en reste pas moins nécessaire tant
sur le plan individuel que collectif. D’où la nécessité de chercher les moyens
de le réhabiliter ou d’en rénover la conception par une intégration des
principes que la tradition nous transmet dans les exigences de la vie moderne
contemporaine.
Éternelle question des invariants et du contingent… Du substantiel
et du négligeable…De l’absolu et du relatif…
Le secret est dans tous ses états!
Nous y reviendrons !
« Ton secret est ton esclave ; mais si tu le laisses échapper, il deviendra ton maître. »
RépondreSupprimerProverbe hébreu