Nordhal Lelandais a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité avec une peine de sûreté de 22 ans.
La vérité a enfin pu surgir de la bouche de cet accusé grâce
au travail exceptionnel de ses avocats qui sont parvenus à lui faire avouer ce
pour quoi il était jugé.
Cependant et sous cette réserve, ce procès allait vers une issue inéluctable et connue d’avance.
Un débat s'est engagé.
Certains se sont émus de ce qu’en réalité cette
perpétuité se réduira à 22 années au-delà desquelles le condamné aura la
possibilité d’obtenir des remises de peine et pourquoi pas sa libération
conditionnelle puis définitive… Les mêmes estiment que la perpétuité devrait
être réelle… Ce à quoi il leur est objecté qu’une telle perspective serait à ce
point inhumaine qu’elle serait impossible à exécuter car elle transformerait en
effet les condamnés en des bêtes sauvages n’ayant plus d’autre perspective que
la mort ou le néant… Et les mêmes de faire observer que cette perpétuité réelle
serait au fond peut-être plus inhumaine que la peine de mort….
C’était un procès dont autrefois l’enjeu aurait
précisément été la peine de mort. Aurait-il fallu que cet enjeu soit celui d’une
perpétuité réelle ?
Est-ce donc à dire non pas que ce fut un procès pour rien
puisqu’encore une fois il a permis à la famille de la victime d’entendre le
condamné avouer ce qu’il avait refusé de reconnaître jusque-là, mais que ce fut
un procès sans véritable enjeu ? La question est posée, comme pour les procès
des terroristes d’ailleurs…
Faut-il envisager d’instaurer la possibilité pour les Cours d’Assises de prononcer une peine de perpétuité incompressible. Il ne fait pas de doute que si le code pénal le prévoyait il y aurait de très fortes chances pour qu’un jury populaire l’envisageât dans des cas comme celui du meurtrier de la petite Maëlys. Ce qui revient à dire que sans états d’âme, la justice pourrait envoyer des condamnés dans un couloir qui les mènerait à la mort au terme de très longues années de détention vidées de tout espoir de recouvrement de la liberté.
Indépendamment du fait que de pareilles condamnations
poseraient des problèmes d’exécution extrêmement difficiles à gérer notamment
pour les gardiens exposés à de grands risques de rébellion, je ne vois là que lâcheté, faiblesse en plus du danger que cela représenterait dans nos prisons. Mais ce n'est pas pour ces raisons qu'elles sont repoussées...
En réalité cette peine se heurterait à la même condamnation que la peine de mort car elle postulerait le fait que certains condamnés n’auraient pas droit à la réinsertion sociale. Ceux qui refusent la peine de mort s’opposent à cette vraie perpétuité en vertu des mêmes principes et de la religion des droits de l’homme telle qu’ils sont si remarquablement dénoncés par Jean-Louis Harrouel dans son livre « libres réflexions sur la peine de mort ». Car pour eux, comme pour Victor Hugo qui initia ce combat, l’accusé n’est pas responsable. https://www.blogger.com/blog/post/edit/4030142411036119731/9137974078642439796?hl=fr Le mal ne proviendrai pas du criminel, il ne serait pas en lui. Le mal lui serait imposé de l’extérieur, par des forces sociales qui l’ont obligé à commettre le crime qui lui est reproché… etc. etc. nous connaissons la musique. Elle n’est pas toujours fausse mais à l’inverse elle n’est pas une vérité révélée ni le dogme que nous en avons fait. Rousseau quand tu nous tiens….
Dès lors, nous sommes donc une fois encore renvoyés au débat
sur la peine de mort. Relisons Victor Hugo qui a sans doute eu les mots les
plus forts pour la dénoncer sur un plan quasi métaphysique dans des vers
éternels et inoubliables :
Ainsi vous touchez au
trépas,
Vous touchez à la
hache, à la tombe, au peut-être !
Ainsi vous maniez la
mort sans la connaître !
Vous êtes des
méchants et des infortunés.
Dieu s’est réservé
l’homme et vous le lui prenez.
Vous n’avez pas
construit et vous osez détruire !
Ô vivants ! vous
n’avez d’autre droit que de dire
À cet homme qui seul
sait ce qu’a fait son bras :
Es-tu coupable ? vis,
sachant que tu mourras.
Ô vivants, le ciel
sent on ne sait quelle honte
Quand, vous regardant
faire en votre ombre, il confronte
Le crime et
l’échafaud, l’un de l’autre indignés.
Vous saignez du côté
du crime, et vous saignez
Du côté de la loi,
croyant faire équilibre
Au meurtrier fatal
par le meurtrier libre,
Donnant pour
contrepoids au bandit le bourreau.
Vous tirez, vous
aussi, le trépas du fourreau !
Vous allez et venez
dans l’obscur phénomène !
Dieu fait la mort
divine et vous la mort humaine !
Sombre usurpation
dont frémit le penseur.
Dieu vit ; de
l’infini vous percez l’épaisseur,
Peuple, et vous lui
changez son coupable en victime.
Un homme monstre est
là ; vous l’imitez. Un crime
Est-il une raison
d’un autre crime, hélas ?
Faut-il, tristes
vivants qui devez être las,
L’homme ayant fait le
mal, que la loi continue ?
De quel droit
mettez-vous une âme toute nue,
Et faites-vous subir
à cette nudité
L’effrayant
face-à-face avec l’éternité ?
Ce dépouillement
brusque est interdit au juge.
De quel droit
changez-vous en écueil le refuge ?
L’homme est aveugle
et Dieu par la main le conduit ;
Dieu nous a mis à
tous sur la face la nuit ;
Il ne nous a point
faits transparents ; il nous couvre
D’un suaire de chair
et d’ombre qui s’entr’ouvre
Quand il veut, au
moment indiqué par lui seul ;
Vivants, c’est à la
mort que tombe le linceul ;
Nous sommes jusque-là
des inconnus ; Dieu laisse
Aux âmes un instant
pour rêver, la vieillesse,
Le droit à la fatigue
et le droit au remords ;
Malheur si nous
faisons soudainement des morts !
Que l’obscur Dieu,
toujours clément, toujours propice,
Étant le fond du
gouffre, ouvre le précipice,
Il le peut, c’est en
lui qu’on tombe, et, quel que soit
Le rejeté, c’est Dieu
pensif qui le reçoit ;
Mais, vivants, votre
loi, qu’est-elle et que peut-elle ?
Sur nous la forme
humaine, en nous l’âme immortelle ;
Nous sommes des
noirceurs sous le ciel étoile.
Je m’ignore, je suis
pour moi-même voilé,
Dieu seul sait qui je
suis et comment je me nomme.
L’arrachement du
masque est-il permis à l'homme ?
De quel droit
faites-vous cette surprise à Dieu ?
Quoi ! vous mettez la
fin de la vie au milieu !
Vous ouvrez et fermez
la fatale fenêtre !
A tâtons ! Apprenez
ceci : mourir c’est naître
Ailleurs. Quel noir
travail, ô pâles travailleurs !
Comprenez-vous ce mot
épouvantable, ailleurs ?
Frémissez. Savez-vous
le possible d’une âme ?
Mais cette « condamnation métaphysique » de la peine de mort se retourne pour des raisons …métaphysiques.
Car en plaçant la discussion à ce niveau on se met en réalité au pied de la croix, face au bon larron que le Christ ne fit pas échapper à la mort alors qu’il en avait le pouvoir, lui qui avait resuscité Lazarre ! Le bon larron implora le pardon de Dieu et mourut. Car comme le rappelle le R.P. Bruckberger, dans son livre 'Oui à la peine de mort" seul Dieu et la victime peuvent pardonner. La société n’en a ni le droit ni le pouvoir ; elle qui doit juger au nom du bien commun, pour faire régner la sécurité et la paix civile.
La condamnation à une perpétuité réelle serait une
lâcheté en plus d’être inhumaine et dangereuse. Quant au rétablissement de la
peine de mort il est inenvisageable dans une société sécularisée, athée,
laïciste. Autant que cela puisse choquer, la peine de mort ne peut se concevoir
que pour des raisons métaphysiques par ce qu'en se plaçant au niveau de Victor Hugo Dieu
seul peut juger définitivement le coupable à l’instar de NSJC avec le bon larron
à Gethsémani.
Illustration.
Gilles de Rais qui combattit avec Jeanne d’Arc à la
demande de Charles VII sombra ensuite dans le satanisme et la pédo-criminalité! Il
commit l’horreur. Une déchéance totale.
Au Tribunal, Gilles de Rais confessa ses crimes. Il raconta ainsi l’agonie vécue par tous les enfants, devant des parents en détresse. A la
fin, il tomba sur ses genoux en criant « Ô Dieu, mon Rédempteur, je vous
demande miséricorde et pardon ». Puis il se tourna vers le peuple et cria à
nouveau « Vous, les parents de ceux que j’ai si cruellement mis à mort, donnez,
ah ! donnez-moi le secours de vos pieuses prières ! ». L’histoire dit que la
foule tomba à genoux et pria pour lui ; que l’évêque président le tribunal de l’inquisition
descendit lui donner le baiser de paix avant de prononcer sa
condamnation à mort.
La demande de pardon de Nordhal Lelandais n’avait rien de
comparable à celle de Gilles de Rais.
Les capacités des familles et de la société à accepter
cette démarche n’étaient pas les mêmes, sans qu’il soit ici question de leur en
faire le reproche.
Une telle scène est inimaginable aujourd’hui.
Faute d'une possible réelle perpétuité pour les raisons ci-dessus évoquées la peine de mort l’est difficilement.
Il serait à craindre que s’il advenait qu’elle soit rétablie elle ne soit l’outil d’une violence déplacée ou injustifiée même s’il
conviendrait, et ce serait le seul moyen de combattre les erreurs judiciaires
ou les abus éventuels, que soit largement mis en œuvre le droit de grâce qui n’a
malheureusement pas été utilisé par le dernier Président de la République confronté
à la condamnation à mort d’un accusé susceptible d’être innocent ; je veux
parler du président Valéry Giscard d’Estaing fasse à Christian Ranucci…
Car si la société humaine se doit d’être ferme, exemplaire et intraitable elle doit également faire régner en son sein une
justice équilibrée qui ne tombe jamais dans l’abus ; le rétablissement de l’équilibre
de la balance revenant au bout du bout à celui qui détient le pouvoir de vie et
de mort – celui qui envoie aussi à la guerre - à savoir le chef de l’État.
Semper idem...
Il reste que le paradoxe est que notre société se pose des cas de conscience pour condamner à mort les pires criminels alors qu’elle légalise, soutient et finance des dizaines de milliers d’avortements qui chaque année font disparaître des vies innocentes dans le sein de leur mère…
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